À L’OCCASION DE LA REMISE DU PRIX INTERNATIONAL 2013 DE LA FONDATION JAMNALAL BAJAJ POUR LA PROMOTION DES VALEURS GANDHIENNES EN-DEHORS DE L’INDE
Clic ici pour lire la premère partie de la lettre, et la remise du prix.
Clic sur l'image ci-dessous pour en savoir davantage (en anglais)
Visite à Wardha
Le lendemain, nous quittons notre hôtel à 4h 30 du matin pour nous rendre à l’aéroport afin de nous rendre à Nagpur d’où un bus nous conduira à Wardha. Nous commençons par visiter l’ashram de Paunar, à 8 km au nord de Wardha. C’est dans cet ashram que vécut Vinoba Bhave qui est considéré comme l’un des principaux héritiers de Gandhi. Il s’illustra par le mouvement du « don de la terre » qui demandait aux riches paysans de partager leurs terres avec les plus pauvres. Là se trouve un mémorial qui contient les cendres de Vinoba.
J’avoue avoir eu quelque difficulté à intérioriser le surcroît de vénération dont est entouré la mémoire de Vinoba. Au cours de la rencontre que nous avons avec le responsable de l’ashram, j’évoque ma rencontre avec Jayaprakash Narayan (Ji Pi) en janvier 1977 à Patna. Lorsque celui-ci avait décidé d’organiser la résistance au pouvoir autoritaire du Premier ministre Indira Gandhi, Vinoba lui avait exprimé son désaccord. (Voir sur ce sujet mon article « La non-violence à l’épreuve du pouvoir », dans Gandhi, artisan de la non-violence, Non-Violence Actualité, Montargis, 1991, p. 49-54) Il n’a jamais fait aucun doute pour moi que Ji Pi avait raison contre Vinoba. Mais ce n’était manifestement pas l’opinion de mon interlocuteur. J'ai eu d'autres occasions d'échanger sur ce sujet et j'ai pu constater que mon avis était largement partagé.
Nous sommes ensuite accueillis à L’Institut d’études gandhiennes (Institute of Gandhian Studies) où nous rencontrons Bharat Mahodaya, le directeur de l’Institut, et Siby K. Joseth, le doyen des études et des recherches. J’évoque avec ces derniers la question de la dissuasion nucléaire indienne.
Dans l’après-midi, je participe avec les autres lauréats à une table ronde au Centre scientifique de la Fondation Bajaj devant une assemblée impressionnante de plusieurs centaines de personnes.
Alors que les autres membres de notre délégation rejoignent Bombay dans la matinée du 17 novembre, Hélène et moi restons pour la journée Wardha. Je suis invité à donner une conférence à l’Institut des études gandhiennes sur le thème : « Les défis contemporains de l’action non-violente ». Parmi ces défis, j’insiste sur celui de l’arme nucléaire.
Dans l’après-midi, nous visitons longuement l’ashram de Sevagram. C’est en septembre 1933 que Gandhi vint à Wardha, à 75 km de Nagpur, à l’invitation de Jamnalal Bajaj qui habitait dans cette ville et qui l’avait pressé de s’installer dans cette localité. Gandhi demeura alors dans une annexe de la demeure de Bajaj. En avril 1936, Gandhi, voulant vivre au milieu des pauvres paysans des campagnes, décide de s’installer sur un terrain vague infesté de serpents près du petit village de Shegaon à 8 km de Wardha. Une case en terre fut construite sur les instructions de Gandhi. Par la suite plusieurs huttes furent également construites. En 1940, il nomme ce lieu Sevagram - ce qui signifie « vlllage du service » - qui devient alors son quartier général. C’est là que furent prises désormais les décisions concernant la destinée de l’Inde. C’est à Sevagram, qu’en 1942, il décide de lancer une campagne de désobéissance civile pour exiger des Anglais qu’ils quittent l’inde : « Quit India ». Il sera arrêté le 9 août 1942 et emprisonné à la prison de Poona. Il ne sera libéré que le 6 mai 1944. L’indépendance de l’Inde sera proclamée le 15 août 1947.
En guise de conclusion
Nombreux sont ceux qui m’ont dit : « Tu dois être fier de ce prix bien mérité ?! » À vrai dire, j’éprouve une réelle difficulté pour trouver le ton juste pour exprimer ce que je ressens. Certes, je ne saurais cacher ma satisfaction de voir ainsi reconnu mon investissement en faveur de la non-violence qui est en effet le sens de ma vie, mais je me garde d’afficher une fierté ostentatoire qui ferait preuve d’une présomption déplacée. Qui peut faire valoir sans prétention ses propres mérites ? J’ai simplement fait ma part de travail et je mesure la chance qui m’a permis de l’accomplir. J’ai conscience que les éloges qui me sont adressés par la Fondation Jamnalal Bajaj le sont à travers des formules de circonstance qui ne sont pas sans quelque excès. C’est en quelque sorte la règle du jeu, mais il ne faut pas s’y tromper. Pour autant, elles ne sont pas convenues et il serait incorrect de ma part de douter de leur sincérité. Je les accepte donc avec reconnaissance.
Ce qui me touche le plus, ce n’est pas tant l’attribution de ce prix, que les nombreux signes d’amitié qui me sont adressés à cette occasion. Oserais-je dire que je suis étonné par l’enthousiasme de tous ceux qui me disent leur joie de me voir ainsi récompensé. Quand tout sera dit, ce qui me restera c’est bien ce surcroît d’amitié dont je voudrais très sincèrement remercier tous ceux qui me l’ont manifesté.