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23 mars 2016 3 23 /03 /mars /2016 06:00

Le jour de Pâques, le 27 mars, c'est le 20ème anniversaire de l'enlèvement des moines à Tibhirine. A l'occasion de ce triste anniversaire, Lulu nous parle aujourd'hui de frère Christophe assassiné le 23 mai avec 6 de ses frères moines. 

Les moines de Tibhirine - frère Christophe

Christophe Le Breton né à Blois en 1950

Marqué par les événements de 1968. Il ressent à travers le printemps révolté une soif d'absolu. C'est pour être coopérant qu'il part en Algérie de 1972 à 1974. Enseignant dans un quartier populaire d'Alger, il prend à cœur le sort des personnes handicapées. Pendant sa période de coopération, un prêtre d'Alger l'invite à participer à une messe chez les moines de l'Atlas. C'est là qu'il décide de sa vocation monastique.

 

En 1975, il a fini sa coopération. Il revient à l'Abbaye de Tamié.

C'est de là, après quelques années, que le désir de revenir à Tibhirine le gagne.

C'est là qu'il fera vœu de stabilité. Il prononce ses vœux temporaires en 1976 à Tibhirine. Cette année là, Christophe revient à Tamié. Il y reste jusqu'en 1980. Il y est ordonné prêtre. Il fait un séjour aux Dombes. Il y suit une formation de menuisier. Il reprend confiance en Tibhirine et fait connaître à Christian son souhait de revenir à Tibhirine. Tamié lui accorde son changement de stabilité. Christophe prend à Tibhirine la charge du jardinage. Il fait appel à des gens du village pour certaines tâches spécifiques. En 1992 il y devient maître des novices.

 

Avec Célestin ils se chargent de la liturgie, adaptent des chants en arabe. Il se joint très tôt au Ribat Es Salam.

Les moines à Tibhirine comme dans tous les monastères, composent une mosaïque d'opinions et de tempéraments divers qui se nourrit chaque jour d'une confrontation féconde.

Jean-Pierre : « Tu vois, on parlait d'une échelle à deux battants tout à l'heure pour exprimer par cette image notre recherche de Dieu, entre chrétiens et musulmans, notre quête de l'Absolu. Mais dans un monastère, nous pouvons reprendre cette image de l'échelle à plusieurs battants cette fois, pour dire le chemin escarpé et particulier que chaque moine emprunte pour tendre à rencontrer Dieu, en respectant le fait que chacun de ses compagnons emprunte un chemin lui aussi unique mais que tous convergent vers le même point . »

Lucien : « En t'écoutant Jean-Pierre et en retraçant ces chemins empruntés personnellement par chacun de tes frères de Notre Dame de l'Atlas, et par toi-même, je suis renvoyé au chemin que j'ai pris moi-même un jour de 1959 en direction de l'Algérie, en compagnie de Jean-Claude, Bernard, Jean, Alphonse et combien d'autres ... ceux que j'appelle mes amis-copains de régiment. C'était le même chemin que vous, les moines de Tibhirine. Nous prenions, nous aussi depuis Alger-Sidi Ferruch la route des gorges de la Chiffa ... Nous traversions Médéa... Nous entrions dans le massif de l'Ouarsenis... Nous ne connaissions pas encore l'existence du monastère de Tibhirine.

 

Jean-Pierre : « Déjà Luc Dochier et Amédée Noto étaient là à Tibhirine... Moi j'y entrerai en 1964 au lendemain de l'indépendance.

Lucien : « Nous empruntions le même chemin que vous, mais ce n'était pas dans le même but. C'était le contraire de l'échelle à double battant. Nous venions pour soi-disant (pacifier)...Comme nous avons abîmé ce mot !

Nous avons jeté dans l'abîme sa signification. En fait, massivement (nous étions en permanence plus de 400.000 soldats en Algérie pour maintenir l'ordre... celui-là de la colonisation !) Nous venions poursuivre des vivants, des résistants. Afin de justifier cette traque et la mort qui souvent s'en suivait, nous mettions sur ces hommes et ces femmes les étiquettes de « rebelles » et « terroristes ».

Et des fois, c'étaient aussi de nos amis et compagnons qui trouvaient la mort dans la profondeur de ces oueds ou sur le flanc des djebels.

 

C'est pas très loin de là que notre ami Jean-Marie Buisset fut tué dans une embuscade, à quelques kilomètres de Médéa-Tibhirine. Ses parents apprirent sa mort le jour de la fête des mères, le 29 Mai 1959 à Beaulieu dans les Ardennes.

Je dis « notre ami » en parlant de Jean-Marie, car parti quelques mois avant nous en Algérie, il avait écrit à plusieurs d'entre nous des lettres tellement marquantes qu'avec l’aumônier, le Père Jego, nous en avions fait un petit livre que nous avions intitulé «  Témoignage d'Amour ». Que de crapahuts et opérations j'ai moi aussi accomplies dans cette région avec les camarades du régiment parachutiste dans lequel je me trouvais : le 3ème RPIMA. Je ne savais pas bien sûr, que des frères comme Luc et Amédée étaient à Tibhirine depuis 1946 déjà, «  témoins d'une invincible espérance » au flanc de cet Atlas que nous rendions si meurtrier pour les algériens et aussi pour les soldats que nous étions.

 

Et toi Jean-Pierre, tu es venu à Tibhirine en quelle année ?

Jean-Pierre : « C'est en 1964 que je suis arrivé avec un groupe de religieux envoyé par notre Abbaye de Timadeuc en Bretagne ».

C'était au lendemain de l'Indépendance. « A cette époque en effet, l'avenir est incertain pour les européens d'Algérie, il est sérieusement question d'abandonner Notre Dame de l'Atlas. Le Père Duval, célèbre « progressiste » que l'OAS surnomme « Mohammed Duval » oppose toute son énergie à la fermeture de l'abbaye... Évêque d'Hippone en 1946, il est depuis 1954 Évêque d'Alger et affirme ses positions en faveur de l'auto-détermination. Plusieurs moines s'en vont en France rejoindre leur abbaye d'origine et seuls quelques frères résistent, fidèles aux vœux de « vivre et mourir dans ce nid d'aigle »

Lucien : « C'est dans cet Ouarsenis, face à ce rouleau compresseur que fut le plan Challes, où tant de gens trouvèrent la mort, la déportation, l'engament forcé dans la constitution de harkas, qu'avec quelques camarades nous opposions  ce que nous disait notre conscience d'homme. C'est extrêmement dur d'oser faire sortir de sa bouche et de son regard de tout petit soldat tout seul face à un cordon d'officiers parachutistes baraqués et baroudeurs, certains ayant fait l'Indochine, que la dignité de n'importe quel homme est intouchable.

 

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  • : Lulu en camp volant
  • Lulu en camp volant
  • : Lucien Converset, dit Lulu est prêtre. A 75 ans, il est parti le 25 mars 2012 avec son âne Isidore en direction de Bethléem, où il est arrivé le 17 juin 2013. Il a marché pour la paix et le désarmement nucléaire unilatéral de la France. De retour en France, il poursuit ce combat. Merci à lui ! Pour vous abonner à ce blog, RDV plus bas dans cette colonne. Pour contacter l'administrateur du blog, cliquez sur contact ci-dessous.
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