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3 février 2022 4 03 /02 /février /2022 21:16
Reconnaissance

Dampierre. Noël 2021


OU EST-CE QUE PEUT BIEN CRECHER CELUI QUI VA DONNER SENS À NOS VIES ?

 

Ne sommes-nous pas plusieurs centaines de personnes du secteur NORD-JURA à être venues à EVANS durant le temps de NOËL, du 18 au 28 décembre 2021 ? Nous répondions à l’invitation d’une petite équipe de gens de ce village autour de Charles et Gérard, nous disant : « Venez voir dans l’écurie de la ferme de la famille HUDRY comment des artisans-artistes de tous âges ont fabriqué, modelé et peint de leurs mains et de leurs cœurs la façon dont ils pensent que s’est réalisée la naissance de Jésus dans la crèche. J’avais compris à travers ce que m’exprimaient les membres de cette équipe animatrice, qu’une grande joie nous serait donnée en venant reconnaitre ce que d’autres avaient fait. Je ressentais quelque chose qui devait ressembler au tressaillement qui avait dû habiter le cœur des bergers des environs de BETHLÉEM et l’âme des mages du lointain ORIENT. Les bergers et les mages étaient les uns et les autres des chercheurs. Afin de trouver sens à leur existence, ils avaient senti qu’un « déplacement » était à opérer dans l’agencement de leur vie et que du temps était à prendre pour y parvenir. Alors ils s’étaient mis en route.


Avec quelques amis et leurs enfants, nous décidions d’atteler les ânes GAMIN et RAMEAUX à la charrette et d’emprunter « le chemin des ouvriers » qui relie DAMPIERRE à EVANS par les champs qui s’étendent entre nos deux villages.
Lorsque j’étais enfant, c’est par ce chemin-là que mon papa m’emmenait avec lui, le temps de semailles étant venu. Il allait aider des amis paysans à semer leur blé. Il m’asseyait sur le semoir tiré par le cheval Coco et me mettait les guides du cheval entre les mains. Qu’est-ce que j’étais heureux ! Je ressentais le bonheur d’être un peu, moi aussi, « le semeur »
C’était déjà par ce chemin caillouteux que de nombreux « paysans-ouvriers » étaient passés afin de se rendre à leur travail ou en revenir. Ils avaient transporté le fer à l’état brut qu’ils avaient extrait des coteaux entourant le village des MINERAIS. Ils devaient être déjà très fatigués lorsqu’ils parvenaient avec leur chargement aux forges de FRAISANS. C’est qu’il en venait du monde travailler aux abords de ces hauts-fourneaux. Il en est sorti du fer de tous ces ateliers, afin de construire des ponts reliant les humains qui nous mirent au monde.

 

Durant ce trajet de DAMPIERRE à EVANS, c’était encore sur le même chemin que nous nous racontions ce qui faisait les joies et les difficultés de nos vies. Combien de projets n’avaient pas pu se réaliser par des adolescents en raison de perturbations venant du coronavirus. Nous constations que beaucoup de nos amis et nous-mêmes avions tendance à rester enfermés chez nous. Nous comprenions la peur des autres. Nous sentions bien qu’elle nous guettait tous. Mais nous sentions aussi que la petite fille ESPÉRANCE cherchait à nous rattraper.
Le long de ce chemin je pus partager les épreuves qui me touchaient de très près. Le frère Jean-Pierre SCHUMACHER était mort le 22 novembre, il y avait juste un mois. Comment assumer l’héritage de la non-violence dont il nous avait dotés en communion d’esprit avec ses frères de TIBHIRINE ? Ça pouvait être merveilleux en ces temps où nous nous sentions agressés de toutes parts et tentés d’être agresseurs nous-mêmes vis-à-vis des gens venant barrer le chemin de nos engagements et actions. Il nous apparaissait difficile d’être non-violents.
En ce temps de Noël, c’était de naissance et de vie que nous voulions pouvoir parler, « de ce Verbe qui s’était fait chair et de cet enfant nouveau-né qui nous est donné » Et c’était pendant ce cheminement qu’arrivait la mort de notre ami Jean-Marie MULLER, fondateur du mouvement pour une alternative non-violente, le M.A.N.V., auteur du livre « l’ Évangile de la non-violence ». Peu de temps après la mort des moines de TIBHIRINE, Jean-Marie avait écrit le livre où il nous indiquait le chemin et la stratégie qu’avaient empruntés et créés les membres de cette petite communauté monastique avec les gens du village et ceux des environs. Et Jean-Marie MULLER avait dédicacé ce livre à notre ami Gaby MAIRE, assassiné au Brésil le 23 décembre 1989. Avec Gaby j’avais appris à marcher dans le sillage de Jésus, celui-là vers lequel nous orientons nos pas, en allant à la crèche d’EVANS. Gaby avait dit : « Je préfère une mort qui mène à la vie plutôt qu’une vie qui mène à la mort. »
Et il avait vécu ce qu’il avait dit.


Les sentiments dont j’essayais d’imprégner mes paroles et mes attitudes à l’égard des personnes avec qui je marchais en direction de la crèche étaient des sentiments de RECONNAISSANCE. Qu’est-ce qu’il est beau ce mot qui surgit dans nos êtres, lorsque tout en marchant nous ressentons que c’est grâce à d’autres que nous sommes en capacité de lutter contre l’emportement, la haine et toutes sortes de violences. J’adore ce mot RECONNAÎTRE, car je crois que le VERBE y habite. 
C’est dans cette façon de marcher et de vivre que « le Verbe est en train de se faire chair » 
L’attitude de « RECONNAISSANCE » nous indique le chemin à emprunter afin que se réalise une naissance ou bien une renaissance. Tout cela apparaît grâce à une connaissance.

 

Nous étions heureux d’aborder les premières maisons du village d’EVANS et d’entendre des gens nous dire « On ne vous demande pas où vous allez avec vos ânes ! Vous allez à la crèche. » Nous commencions à croiser beaucoup de gens qui sortaient de cet endroit magique qui avait tant enchanté mon enfance. Des gens nous disaient : « C’est vraiment l’endroit où il fallait venir avec vos enfants et vos ânes ». En approchant de l’écurie où nous allions pouvoir nous émerveiller de la façon dont beaucoup de gens ressentent et expriment ce que dit au monde cet acte de la naissance de Jésus ?
Il me revient que des petites chaînes dont une extrémité est scellée dans le mur, pendent de chaque côté de la porte d’entrée de l’écurie. J’en connaissais la disposition depuis que j’étais gamin, car c’était là que nous fixions le mousqueton des licols des chevaux avec lesquels nous venions travailler avec mon papa. Je suis heureux d’y accrocher celui des licols de nos ânes.

 

Nous entrons alors dans l’écurie.
Enfant j’y avais vu les fils de la famille HUDRY travailler avec mon papa à soigner les animaux de la ferme. J’avais aimé la belle façon dont s’y accomplissait ce travail.
Et aujourd’hui dans une ambiance lumineuse et festive voulait se maintenir en humilité le travail des auteurs de ces nombreuses crèches se dévoilant sous nos yeux. Au fur et à mesure que nous avancions dans cette écurie toute transformée, notre admiration de ces œuvres était accompagnée des explications des réalisateurs eux-mêmes. Ce n’est pas tous les jours, qu’en admirant des œuvres d’art, nous ayons à nos côtés les personnes réalisatrices de l’ouvrage. Échanges qui surgissaient de toutes parts entre les visiteurs-mendiants que nous étions et les réalisateurs qui tentaient de répondre à nos questionnements, ou d’écouter nos paroles d’estime. Il se répandait entre nous tous, quelque chose qui avait trait à la RÉCEPTION d’un trésor qui nous concernait tous, d’un héritage dont nous étions tous appelés à devenir bénéficiaires.


Dans l’église du village d’EVANS le tintement des cloches de l’ANGELUS n’allait pas tarder à communiquer à toute volée « ces choses cachées depuis le commencement du monde… » dévoilées et développées dans l’écurie de la ferme voisine. Le prophète Isaïe avait commencé de nous révéler ce fait mystérieux : « C’est une Vierge qui enfantera notre sauveur. C’est dans un climat de non-violence que nous parviendrons à la Paix. C’est avec le fer de vos armes qu’il vous faudra forger le soc de vos charrues ».


Les cloches continueraient à nous faire vibrer d’émotion en nous annonçant cette bonne nouvelle : « Le petit enfant qui est né dans la crèche de l’écurie est le fils de Dieu… LE VERBE S’EST FAIT CHAIR pour que, de notre chair blessée jaillisse une parole qui nous libère ». Il nous revenait sur le chemin du retour ce que notre pape François nous raconte dans sa lettre « FRATELLI TUTTI ». Ii écrivait que nous sommes à un moment de notre Histoire où nous avons les capacités inventives et le devoir d’arrêter ce fait scandaleux, que des parents soient réduits à ne trouver qu’une écurie, ou la rue, ou la migration comme refuge pour mettre au moindre le fruit de leur amour. « NOEL nous écrivait-il encore, c’est opérer un déplacement dans nos vies pour que toute famille ait un coin de la TERRE où bâtir un TOIT et y exercer un TRAVAIL respectant la dignité de tous. »


Lucien CONVERSET
 

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26 décembre 2021 7 26 /12 /décembre /2021 22:13

Dampierre, le 19 décembre 2021

   

OU PEUT BIEN CRECHER LA PETITE FILLE ESPÉRANCE ?


La nouvelle est en train de se répandre à plein d’endroits de la Terre des Hommes : en France, en Franche-Comté, en Europe, en Pologne, en beaucoup de carrefours du Moyen Orient, en Inde …

«  Jean-Marie MULLER est mort » 

Et dans l’immédiat un écho se fait entendre : « Continuons de vivre dans le sillage qu’il nous a tracé »
 

Nous voilà recevant un sacré héritage, celui-là de la non-violence portant dans ses bras une petite fille, la petite fille dont parle Charles PEGUY, « la petite fille Espérance »


Cher Jean-Marie,


Dans ta vie de chercheur du sens de notre existence, tu as découvert comme une étoile dans notre univers : c’est la non-violence. Elle a illuminé ta vie.
Et comme tout vrai chercheur, tu as voulu communiquer et partager ce qui t’étais donné.
Ce fut la passion de ta vie.
Nous allons être nombreux à exprimer notre amitié reconnaissante à ta famille, à ton épouse Hélène, à vos enfants Isabelle et Vincent, à leurs conjoints, à vos petits-enfants.
Les équipes d’artisans de la non-violence que tu as suscitées tout au long de ta vie. Vous n’avez pas cessé de nous faire voir la beauté et la vérité de l’héritage qui nous est donné, en même temps que l’urgence de l’exercer, d’en fabriquer une stratégie, afin d’être efficaces le plus vite possible dans l’établissement de la PAIX.
Nous démettre de nos forces de pouvoir, de savoir et d’avoir, afin de les orienter à être au service de l’évolution de notre Humanité.
Tel est l’appel que nous ressentons.


Elle est merveilleuse la mine des trésors de la non-violence dans laquelle tu nous a fait entrer, Jean-Marie, à la suite de TOLSTOÏ, GANDHI, LUTHER KING, BOLLARDIÈRE, Simone WEILL, les MOINES DE THIBIRINE et bien sûr du galiléen JÉSUS, comme tu aimais l’appeler.


Qu’est-ce que c’est beau et source d’engagement ce que tu as ramassé dans tes nombreux livres et dit dans tes multiples conférences, à propos de la vie actée de tous ces humbles témoins-artisans, d’un monde où l’on cherche à faire de la place, d’abord à ceux qui n’ont pas encore trouvé la leur : les petits et les pauvres de nos sociétés, les gens éprouvés et réprouvés. Combien de fois je t’ai entendu appeler toi et nous à cette attitude politique authentique : « après vous, et non pas d’abord nous » Tout cela nous provoquait et continue de nous interpeler à entreprendre de véritables débats. Nous ne pouvons devenir d’authentiques hommes et femmes politiques que si nous faisons de nos ministères des ateliers de service, d’où sortent des décrets débouchant immédiatement dans des actes qui tiennent compte d’abord de la situation des plus démunis …


Avec Jean DESBOIS et Jean-Pierre PERRIN, tu as été traduit au tribunal, parce que vous exigiez la reconnaissance de votre statut d’objecteurs de conscience. Pour cela vous avez dû renvoyer vos livrets militaires. Afin de ne pas renouveler des drames comme celui de la guerre d’Algérie, dont nous sortions, vous avez mené ces actions non-violentes. L’évêque Guy RIOBE d’ORLEANS a su être à vos côtés. Nous avons cherché à faire de même, là où nous vivions. Nous avons senti à travers ce « Procès à ORLÉANS » la nécessité de nous laisser habiter par le souffle de la non-violence. Vous nous avez fait comprendre qu’il en allait de l’avenir de notre Humanité.


En effet une idole était érigée sur les autels des États. C’était la bombe nucléaire. Au regard des détenteurs du pouvoir, nous devions tous nous incliner sous sa protection. Tu as su Jean-Marie nous appeler à la déboulonner. Nous étions de tout notre être solidaires de vos engagements quand avec des gens comme Jacques BOLLARDIÈRE, Jean TOULAT et Brice LALONDE, vous êtes allés dans le Pacifique sur ce petit bateau, le FREE, afin d’empêcher la poursuite de ces actes criminels que sont les essais nucléaires dans l’océan, comme ceux que nous avions commis dans le SAHARA quelques années auparavant. Tu nous a aidés à analyser les causes et les conséquences de ces violences faites à notre Humanité.
En procédant à de tels essais nous détruisons la Terre notre Mère. Nous affamons nos frères et sœurs, en Humanité, en les privant du pain quotidien, et en méprisant leur dignité.


C’est pour enrayer ce désastre, qu’à beaucoup d’endroits se sont constituées de petites équipes du mouvement pour une alternative non-violente, le M.A.N.V. En Franche-Comté, la région où tu es né, nous avons créé un petit groupe d’amis résistants à la violence nucléaire, institutionnalisée par notre État.
Pour avancer dans ton sillage Jean-Marie, nous nous sommes fédérés avec le groupe M.A.N.V.de DIJON. Nous faisons partie d’ICAN. Dans plusieurs villages et villes de notre région, nous plantons de petits GINKGOS BILOBA et avec les conseillers municipaux et le Maire, nous demandons instamment que le Président de la République Française signe le TIAN. Nous demandons l’arrêt de l’armement nucléaire de la France de manière unilatérale.

 

Jean-Marie, ton épouse, tes enfants et petits-enfants ont été présents à tes côtés jusqu’au bout de ta vie.
Ainsi l’héritage de la non-violence dont tes écrits et tes actes étaient porteurs pouvaient continuer à parvenir aux 4 coins du monde.
Je n’oublierai jamais qu’après le drame de l’enlèvement des moines de TIBHIRINE en ALGÉRIE, tu as écrit un livre sur la vie de ces témoins et artisans de la Paix durant les années noires subies par le peuple algérien. Parmi tous les gens que tu as interviewés, il y a le frère Jean-Pierre SCHUMACHER qui vient de mourir un mois avant toi, le 21 novembre.
Tu avais dédicacé et offert ton livre sur les moines de TIBHIRINE, à notre ami jurassien Gaby MAIRE, assassiné le 23 décembre 1989 à VITORIA au BRÉSIL.
Gaby lui aussi, avait voulu donner sa vie à ceux qu’il aimait.


Les paroles mises en actes par tous ces témoins, ne sont-elles pas l’expression de cet évangile de la NON - VIOLENCE que tu as écrit et vécu. Jean-Marie, célébrant et reconnaissant qu’à NOËL le Verbe se fait chair. Notre Humanité ne peut être libérée que si elle se laisse évangéliser par le souffle de la non-violence que nous font respirer les petits et les pauvres.

Merci et amitié reconnaissante à vous Jean-Marie, Jean-Pierre, Gaby et combien d’autres amis de la non-violence, de vous retrouver en ce temps de Noël afin de nous faire voir où crèche la petite fille Espérance.
 

Réjouis-toi Jean-Marie. Le pape François a pris le relais de cet évangile de la non-violence, le chemin de la Paix par le désarmement unilatéral. 
Tu as tellement interpellé les évêques de France, à nous entrainer sur ce chemin de la non-violence, que ça va se réaliser au moment de votre mort Jean-Marie MULLER, Gaby MAIRE, Alice DOMON, Léonie DUQUET, Jean-Pierre SCHUMACHER, Desmond TUTU.

 

Lulu
 

Jean-Marie à Dampierre invité par l’association ADN en avril 2015

Jean-Marie à Dampierre invité par l’association ADN en avril 2015

Les obsèques de Jean-Marie seront célébrées ce 27 décembre à 14h30 à Fleury-les-Aubrais.

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29 avril 2019 1 29 /04 /avril /2019 19:45

Lourdes, mardi 23 avril 2019

 

C’est la question que m’ont posée des amis un peu avant que je ne parte au pèlerinage diocésain qui commençait hier. Ils l’ont fait très fraternellement.


J’aime beaucoup me trouver devant une grotte ou entrer dedans. Je pense à la grotte de Dampierre mon village natal où j’allais jouer avec mes copains étant enfant. J’ai aimé me diriger vers la grotte de Bethléem dans laquelle est né Jésus le Prince de la paix. J’y étais allé au pas de l’âne Isidore en 2012-2013, afin de me désarmer de mes violences. Je pense à beaucoup d’autres grottes que j’ai eu le bonheur de visiter : Lascaux, les Moidons, les Planches en Arbois, la grotte Chauvet, celle d’Amange … C’est beau une grotte. C’est profond ce qui peut nous venir à l’esprit, nous apparaitre, ce qui peut surgir à notre conscience quand on entre dans l’une d’elle et que l’on fait silence en soi. Ça aide à voir d’où l’on vient, de quel ventre maternel nous sortons, et ainsi de mieux parvenir où la vie nous appelle à aller, quels citoyens du monde nous sommes appelés à devenir.


Mardi matin, au lendemain de notre arrivée à Lourdes, tous les gens du pèlerinage du Jura, nous nous sommes rassemblés, avec beaucoup de gens des quatre coins du monde, au pied de la grotte de Massabielle, où Marie la maman du Christ Jésus est apparue à Bernadette. Cette béance de notre mère la terre, m’impressionne profondément, cette cavité dans le ventre de notre planète, où est venue se loger à plusieurs reprises de l’année 1858  la Vierge Marie. Je suis émerveillé de lire au pied de la statue qui représente cet événement, les paroles : «  Que soy immaculata conceptio », « Je suis l’immaculée Conception ». C’est ce que Marie a dit à Bernadette quand elles se sont demandé et dit l’une à l’autre qui elles étaient et ce qu’elles attendaient l’une de l’autre. Et en entendant s’égrener le chapelet de ces rencontres, la foule n’arrête pas de chanter : « Ave Maria » et je suis de ceux-là.


Qu’est-ce qui peut bien continuer de se concevoir, de se conscientiser et de se dire au travers de tous les échanges entre les membres de notre humanité blessée, au bord de l’abîme, de nous tous qui en portons très lourd dans notre cœur et dans notre sac à dos, entre tous les humains que nous sommes et la Maman de Jésus, le Fils du Très Bas. Qu’est-ce qui peut bien m'apparaître quand je dis et reconnais que « le fruit de vos entrailles est béni » ? 


Ce qui sort alors du ventre de la terre est « bien dit ». C’est une « béné-diction ». N’est-ce pas une parole qui peut réparer notre humanité ? Ne sommes-nous pas en présence des pièces multiples d’un puzzle à reconstituer ?


Ça y est, la messe est enclenchée. Le souffle de Jésus, son Esprit-Saint, nous fait prendre conscience que nous tous, les gens qui sommes là, nous sommes le Corps du Christ. A celles et ceux sur qui nous nous appuyons, celles et ceux qui nous ont dit : « Au pied de la grotte, tu déposeras ce que l’on te partage, ce dont on t’a chargé ... ». A nous tous il apparaît : « Le Corps du Christ ».


Ce sont les membres du Corps du Christ qui viennent d’être déchiquetés au Sri Lanka en un acte violent, odieux et fou, par d’autres membres de notre humanité, qui ne savaient pas ce qu’ils faisaient. Eux aussi, ne sont-ils pas les membres du Corps du Christ ?


A la communion, je comprends que l’esprit du Christ nous est donné pour que nous arrêtions de nous massacrer les uns les autres. L’enquête qui va être faite au Sri Lanka et aux Nations Unies, ira-t-elle jusqu’à chercher et trouver, et dénoncer de quels trafics et fabrications criminelles, viennent les armes qui ont déchiré une fois encore, la chair de notre humanité. Donne-nous la force, Ami Jésus, de nous démunir de nos violences, d’inventer des chemins où nous oserons arrêter de fabriquer et vendre des armes.


Il me revient alors à la pensée le visage d’un homme avec qui j’avais créé une profonde amitié. J’étais tout jeune prêtre, cet homme était en grande souffrance et douleur. La violence l’assaillait de bien des endroits. Il voulait, lui, citoyen de la ville où nous habitions, faire acte de justice, pensait-il, il voulait descendre le maire de la cité avec sa carabine 22 long rifle. Je comprenais dans ma prière, que l’amitié qui nous reliait, me demandait de l’aider à se défaire de sa carabine. Ça lui permettrait de ne pas passer à l’acte. J’osai humblement lui proposer de me la confier. Je la cachai sous mon lit. Ça ne suffisait pas, des fois il revenait déjeuner chez nous. Il me la redemandai avec insistance. Je lui disais : « Non ! » C’était pas facile, car il savait que la carabine n’était pas loin. Je priais et demandais à Jésus de me souffler les mots et l’attitude qu’il fallait avoir. Un jour j’arrivais à lui faire accepter qu’on détruise cette carabine. Il fut un petit peu d’accord. Je me dépêchais de briser la gâchette et le percuteur avec une masse, et de faire disparaître le tout. Mon ami m’en voulut pendant un temps. Je lui faisais alors percevoir sa dignité retrouvée. Il vint un peu de paix en lui, petit à petit. Il ne fut jamais assassin d’un de ses frères.


Je pense que je ne cesserais jamais d’être reconnaissant à Jean-Marie Muller et aux membres du M.A.N.V. de nous avoir fait découvrir qu’à l’impossible d’enrayer l’armement nucléaire de la France de manière unilatérale, nous sommes tenus. C’est ce que j’étais heureux de dire dans ma prière devant la grotte de Massabielle, au moment du baiser de paix, j’ajoutais dans ma prière au Christ : «Tu m’as aidé à persuader mon ami de se défaire de sa carabine 22 long rifle … d’arrêter ainsi de menacer de tuer le maire de notre ville … pourrais-tu souffler aux cinq évêques de France qui sont là avec leurs diocésains, dont notre évêque Vincent et nous-mêmes, que nous cherchions et trouvions moyen de créer un rapport de force non-violente avec notre président de la République. Que nos évêques s’engagent et se mouillent pour que notre président arrête de laisser fabriquer des bombes atomiques. Qu’il stoppe dans l’immédiat, de faire perfectionner les armes et engins nucléaires dont nous sommes possesseurs, qu’il fasse entrer notre pays la France, dans le traité signé par les pays de l’ONU en septembre 2017. »

Devant la grotte de Massabielle. Pèlerinage jurassien - avril 2019

Devant la grotte de Massabielle. Pèlerinage jurassien - avril 2019

Voilà ce qui m’apparaissait devant la grotte de Lourdes.


Et en recopiant ces notes sur mon cahier, afin de les partager aux amis que vous êtes, j’entendais Jésus qui me priait et me disait : « T’aurais pu te mouiller toi aussi, en le leur disant, à vos évêques, en pleine messe, au moment où ils vous ont dit : « La Paix soit avec vous »
Je ne l’ai pas fait. Une fois de plus je ne suis pas allé jusqu’au bout de l’objection de conscience. Quand, le ferai-je ?

Lulu Converset

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4 septembre 2018 2 04 /09 /septembre /2018 20:52
Des petites feuilles pleines de promesse

Des petites feuilles pleines de promesse

Dampierre, le 6 août 2018

 

« VENEZ VITE VOIR, LE PETIT GINKGO BILOBA A POUSSE DES FEUILLES »


Ce sont les mots que Jeannot nous adresse à ma sœur Bernadette et à moi, le 6 août, jour anniversaire du drame d’Hiroshima. Je n’ai pas pu participer à la commémoration organisée ce jour même par le groupe ADN à Ranchot. Mon frère, ma sœur et moi étions à l’enterrement de notre cousine Marie Vittot, dans le pays de notre maman, à Chaux les Passavant - La Grâce Dieu.


En nous dirigeant vers le petit ginkgo biloba, Jeannot commence à raconter :
Jeannot : « le matin on allait pour préparer la réunion (du mouvement ADN-MAN), Toinette me dit « On va aller arroser les pieds du petit ginkgo car il vient de mettre des feuilles »


Lulu : « Jeannot, t’es en train de faire de nous les témoins que ce qui a été cassé et brisé dans nos vies peut se réparer. Une fois encore, c’est l’arbre qui parle aux hommes et femmes que nous sommes. Laisserons-nous notre pâte humaine se pétrir du levain qu’est l’attitude et la parole des petits de notre humanité ? Comment passer de « témoins » des cassures à « artisans » de la réparation ? »


En arrivant vers le petit arbre, nous apercevons tout le long du tronc, de belles feuilles vertes bilobées qui poussent pour la joie de nos yeux.
Jeannot : « J’en revenais pas … En mettant le seau d’eau sur les pieds du petit ginkgo, qu’est-ce que je voyais … l’arbre qui poussait des feuilles … par la chaleur qu’il fait … j’ai compté les feuilles, y en a douze »
Lulu : « Et tu nous annonces ça Jeannot, le jour du 6 août, le jour de la commémoration d’Hiroshima … le jour où le ginkgo biloba a résisté dans la fournaise à l’éclatement de la bombe … Je suis très touché par ce que tu es en train de nous faire découvrir Jeannot … »
Jeannot : «  Va falloir qu’on viennent souvent l’arroser. »


Avec Jeannot et ma sœur Bernadette, nous nous racontons comment, à la ressemblance du petit arbre, nous venons tous de très loin. Nous avons vécu et traversé des évènements et des réalités dont nous disons : «  On en revient pas. En fait, nous sommes en train d’ (en revenir) »


Nous avons été très marqués par la teneur du travail de recherche de ces 3500 jeunes, réalisé pendant le festival de la paix à Micropolis du 2 au 5 août à Besançon, dans le souffle du mouvement MRJC, pour les Français et du  KLJB pour les Allemands.


C’est tout un peuple de jeunes, tendus dans la création d’une humanité plus juste et plus fraternelle qui s’exprimait. Dans plusieurs ateliers, durant ces jours du festival de la paix, ces « jeunes prophètes » ont demandé aux « vieux rêveurs » que sont leurs parents et nous les amis de leurs parents, de nous unir avec eux dans leurs luttes, dans leurs façons de faire, dans leurs recherches, et particulièrement celles de la communication non violente (CNV), afin qu’en « désarmant les Dieux » «  il n’y ait aucun exclu pour la fête » Parmi les signes merveilleux que c’est déjà en train de se réaliser, en voici un : Grégory 13 ans, qui a participé à tout le campement MRJC de marche au pas des ânes de Poligny à Besançon, sert la messe aux côtés de Jean-Luc Bouilleret l’évêque, Daniel Petit, Gaby Rognon et quelques aumôniers MRJC-CMR et Mission de France, qui ont tant ramés depuis des années avec ces 3500 jeunes, pour que notre monde tienne dans son avancée vers la paix et la justice. Tout cela grâce à un désarmement effectif, et dans l’établissement d’une ruralité à trempe humaine.


Jean-Marie Guinchard de la Sommette, le papa de Camille, vient communier. Au moment où je lui donne le corps du Christ, il nous dit avec émotion à Grégory et à moi, « Si Lulu est là, c’est à cause de toi Grégory »


La messe que nous célébrons est un moment de reconnaissance humble et étonnante de joie et de fête. Nous exprimons à notre ami Jésus, que notre confiance en Lui, vient du fait que, par sa manière d’aimer, et par la non-violence qui rayonne de son comportement en humanité, il fait que son Père, n’est plus à nos yeux « le Dieu des armées » mais « un Dieu désarmé ». C’est comme cela que nous l’aimons et que nous pouvons le reconnaitre comme « Notre Père ». Nous entendons les bruits que fait la terre parce qu’on la malmène, et les cris des enfants qui n’en peuvent plus, parce qu’ils sont en manque de pain et de père.


Rosine, Alphonse et moi, nous allons dans l’après-midi de ce dimanche du 5 août, à la fin du festival de la paix, chercher les ânes à Montoille, en dessous du Rosemont, chez Jocelyne et Philippe Louison, qui les ont hébergés dans leur enclos de deux hectares, pendant les 4 jours de la fête, à deux pas de la Malcombe, lieu de l’établissement du campement de plus de 500 tentes des festivaliers. Il y eut beaucoup de facilitateurs pour rendre possible cette proximité et cette faisabilité. Parmi eux, Valentin Perriard et Félicien Ragot. L’accessibilité à cet enclos pour les ânes, rendit possible, la marche ballade avec des enfants et leurs parents, participant au festival, les vendredis et samedis après-midi, le long de la Malcombe, Emmaüs, Roche d’Or, vélo route, long du Doubs, Velote. Un véritable atelier itinérant à chaque fois, signifiant expérimentalement ce que nous cherchons en communication non-violente : déligoter et dénouer les nœuds qui abiment nos êtres, et nous réjouir que grâce à cette libération, nous puissions nous relier les uns aux autres. En découvrant comme l’on vécu et dit Christian de Chergé et ses compagnons de Tibhirine, « qu’en chacun des êtres humains réside le don de l’Esprit, dont la joie secrète sera toujours d’établir la communion et de rétablir la ressemblance en jouant avec les différences »


Il avait été prévu à notre rencontre de l’équipe ADN du lundi 2 juillet, qu’en ramenant les ânes à Dampierre le 5 août au soir, à la fin du festival, grâce au véhicule d’Alphonse, nous rendions possible la petite randonnée qui aurait lieu de Dampierre à Ranchot, dans la journée du 6 août. En effet, nous pensions en nous baladant au pas des ânes, aller voir l’exposition des panneaux préparés par Toinette et Elisabeth, disposés par François et intitulés : « Commémoration des bombardements d’Hiroshima et Nagasaki » Ce serait une exposition en binôme avec les peintures de Mme Chantal Prin dans la chapelle de Ranchot. Cette dame avait retenu ce lieu d’exposition depuis plusieurs mois. Elle nous permettait d’adjoindre notre exposition à la sienne. Nous ferions jeûne et marche en solidarité avec les victimes de la bombe. Nous invitions toutes les personnes qui se voulaient solidaires des victimes à venir avec nous. Un beau petit livret, réalisé par les membres de notre association franc-comtoise pour le désarmement nucléaire unilatéral de la France, expliquant à quelles personnes et mouvements nous nous référions dans l’association ADN.


La marche ne pourra pas se réaliser ce 6 août, mais l’exposition dans la chapelle de Ranchot aura lieu, et l’une des personnes référentes de notre lutte sera là, Jean-Marie Muller, fondateur du MAN avec sa femme Hélène, avec leurs enfants et petits-enfants. En effet, Jean-Marie, très fatigué, est venu se reposer aux Calmants chez Marie-Françoise et Claude Bet Garritan pendant la semaine du 5 au 12 août. C’est de là que Jean-Marie viendra avec sa famille animer le débat sur l’urgence d’organiser une défense non violente de notre humanité notamment, en exigeant le désarmement nucléaire de la France de manière unilatérale. Il a commenté le tableau des témoins.


Qu’est-ce que je regrette de n’avoir pu venir vivre une telle journée à Dampierre et Ranchot. En effet, je me trouvais avec ma famille à l’enterrement de notre cousine Marie qui avait lieu le même jour, à la même heure et à 50 kilomètres de distance.


Et Jeannot continue de raconter : « Et puis vous savez pas qui c’est qui était à la chapelle de Ranchot ? Jean-Marie Muller avec sa famille. Même que je me suis dit, quand le Dédé Siclet le journaliste viendra prendre la photo pour mettre un article dans le journal, il faut que je me mette à côté de Jean-Marie, de sa femme et de leurs enfants… Ça va paraitre un de ces jours … Vous verrez dans la semaine … 
Lulu : « Dis voir Jeannot, qui c’est qui était à cette exposition ? »
Jeannot : « Je ne sais pas … Jean-Marie et toute sa famille … Y avait la Toinette, Marie-Françoise, Gilbert et Ginette … François … La Brigitte de Choisey, le Claude a pas pu venir, Jacques Martin n’était pas là, Pierre, je sais pas … Des gens de Fraisans … Je sais pas leurs noms … »
Lulu : «  Jacques et Danielle  … ? »
Jeannot : « Oui, peut-être bien. Jean-Marie a causé. Il était assis parce qu’il était très fatigué … On ira les voir chez Marie-Françoise et Claude du jus de pommes »
Lulu : « Bien sûr ! Demain matin mardi, on ira voir nos amis aux Calmants »


Qu’est-ce que je suis heureux que Jean-Marie soit venu faire une conférence sur la non-violence à Ranchot … dans notre pays, le 6 août, le jour anniversaire où nous jeûnons en pensant aux victimes d’Hiroshima pour qu’il n’y ait plus de menaces d’éclatement de bombes nucléaires sur notre humanité … C’est vraiment la continuation du festival de la paix avec les jeunes du MRJC-KLJB … De quoi est-ce que tu te souviens Jeannot que Jean-Marie a dit dans sa conférence ? »
Jeannot : «  Je sais pas moi … Il a parlé de la violence, il a montré son livre … Je voudrais bien l’avoir »
Lulu : «  Quel livre ? »
Jeannot : « Je sais pas »
Lulu : « Surement son dernier livre : « La violence juste n’existe pas »
Jeannot : « Oui, c’est ça … Je voudrais bien l’avoir … »
Lulu : « On lui demandera quand on ira les voir demain aux Calmants. Ils nous attendent pour promener les enfants au pas des ânes avec la charrette. Qu’est-ce que je suis heureux que nous vivions ces moment-là ensemble … Que tu aies tes congés annuels juste à ce moment-là et que tu sois venu à Dampierre  pour préparer les chemins du campement du MRJC et faire les randonnées au pas des ânes avec la famille de Jean-Marie et Hélène … Qu’est-ce que ça tombe bien !
Jeannot sourit.


Lulu :«  Sais-tu que dans son livre, ce qu’il écrit, ça ressemble à ce que dit le pape François. Ils sont très en communication entre eux … On demandera à Jean-Marie comment ça se fait qu’ils sont reliés comme ça l’un à l’autre, comment ça se fait qu’ils disent et tendent de la même manière à ce qu’avec eux, nous fassions la même chose : «  nous élever en humanité les uns grâce aux autres dans des relations non violentes, en arrêtant de prendre toute la place sur terre, en nous poussant les uns les autres à faire de la place à ceux qui n’en ont pas »


Jeannot sourit encore. Le voici détendu, en paix. Il a comme accompli sa mission. Il vient de raconter à Bernadette et à moi comment il nous a représentés en cette journée du 6 août 2018 où nous n’avons pas pu être là à Dampierre et Ranchot.
Lulu : «  Qu’est-ce que je suis touché que par toi Jeannot, en cette journée du 6 août, nous apprenons que le petit ginkgo biloba a poussé des feuilles, douze … Tu les a comptées sur son tronc. J’ai envie de dire qu’elles se sont reflétées dans l’eau du seau d’eau que tu venais verser sur ses pieds.

 

Par toi aussi, nous apprenons, il se reflète sur ton visage et dans tes paroles, que ce même jour, Jean-Marie était avec sa famille à l’exposition de Ranchot pour exiger le désarmement nucléaire unilatéral de la France… Que ce même jour, Jean-Marie a présenté son dernier livre : «  La violence juste n’existe pas » et que c’est la même chose que ce que déclare le pape François. J’ai encore envie de te dire Jeannot que tu es un des premiers témoins-artisans de tout ce travail … Que c’est à toi aussi que le prix Nobel de la paix a été décerné en septembre 2017 comme à tous ceux qui travaillent à nous démunir de nos violences, et qui s’affilient d’une manière ou d’une autre au mouvement ICAN (Campagne Internationale pour l’abolition des armes nucléaires ) Jeannot, c’est dans la lumière et dans l’amour que l’univers a commencé d’exister … c’est dans la non-violence seulement, que pourra se continuer son achèvement. 
Ma sœur Bernadette nous dit au revoir. Je la remercie pour tout ce qu’elle a rendu possible avec beaucoup de parents de ces jeunes pour la réalisation de ces journées du festival de la paix. Nous partons nous reposer pour être le plus en forme possible durant les rencontres qui nous attendent.


Comment se fait-il que nous ayons été si peu de vieux rêveurs du Jura à répondre à cet appel si plein d’angoisses en même temps que d’espérance, lancé par ces jeunes prophètes … Besançon n’est quand même pas si loin pour que des Jurassiens y accèdent.


Pourquoi si peu de gens de notre diocèse de Saint Claude Poligny, sont venus croiser les pas de ces jeunes faiseurs de paix … travailleurs de la non-violence … ? Pour une fois qu’un réel débat était initié par des jeunes au sujet crucial du désarmement nucléaire de notre pays.


Faudra-t-il encore un autre festival ? Mais sait-on les forces qui sont nécessaires pour lancer et réaliser un tel moment historique ? Le risque ne sera-t-il pas qu’il soit très tard 

Lucien Converset

                                 


 

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16 août 2018 4 16 /08 /août /2018 06:25
Festival de la paix et Commémoration du 6 août 2018

6 août 2018


L’association ADN commémore la bombe nucléaire d’Hiroshima


Du 2 au 5 août un événement de dimension internationale s’est tenu à Besançon : Le festival pour la paix, organisé par le Mouvement rural de la jeunesse chrétienne et son équivalent allemand, le KLJB. Près de 5000 jeunes sont venus dire leur volonté de promouvoir la paix, dans leur vie quotidienne comme dans la vie publique.


Notre ami Lulu s’est investi fortement dans cette aventure, organisant une marche au pas des ânes vers Besançon avec des groupes de jeunes du MRJC et de Pax Christi.( Il ne pouvait être avec nous ce lundi suite à un deuil dans sa famille). Marie-Françoise s’est également engagée dans cette aventure comme bénévole, mettant à la disposition du festival sa maîtrise de l’allemand et sa pratique familiale d’une agriculture au service du développement des personnes et du respect de la terre.


Notre rendez-vous annuel de jeûne et d’échange, en lien avec la mobilisation internationale de commémoration d’Hiroshima était donc modeste, beaucoup d’entre nous ayant d’autres contraintes, de famille ou de santé.


Néanmoins, nous nous sommes retrouvés à Dampierre à 10 heures, et nous avons échangé avec les enfants présents sur le sens de cette journée. Louis Pinsard a présenté les actions de mobilisation pour le désarmement nucléaire de la France proposées par le réseau Sortir du Nucléaire, et l’offre de soutien à des actions militantes proposées par Non-Violence 21. 


A 14h30, nous nous sommes retrouvée à la chapelle de Ranchot, où François avait mis en place les panneaux réalisés par Elisabeth sur les fondamentaux de l’ADN (les grands penseurs-acteurs de la Non-Violence, l’action militante via les plantations de Ginkgo-Biloba).


Jean-Marie Muller nous a rejoints avec sa compagne Hélène et leurs enfants. Il a commenté pour nous l’apport de ces précurseurs de la non-violence, insistant sur la richesse et la complexité de la pensée de Gandhi, pour qui la non-violence n’a rien de la passivité, mais au contraire est un outil actif de lutte. Il a rappelé trois événements récents qui auront un impact certain sur le désarmement nucléaire unilatéral :La conférence pour la Paix qui s’est tenue au Vatican – à laquelle JMM a participé – et qui a permis que disparaisse du message de l’Eglise la notion de « guerre juste ».


•    L’intervention le 10 novembre 2017 du pape François  qui a  exprimé un vif sentiment d’inquiétude en considérant les conséquences humanitaires et environnementales catastrophiques qui découleraient de tout usage des armes nucléaires. C’est pourquoi, a-t-il précisé, « il faut condamner fermement la menace de leur usage, ainsi que leur possession» Cette condamnation de la « possession » des armes nucléaires est décisive, car elle invite chaque Etat à renoncer unilatéralement à la dissuasion nucléaire.


•    Le traité d’interdiction des armes nucléaires proposé par l’ONU en 2017
Cette contribution de Jean-Marie, son éclairage sur les enjeux déterminants  - l’impact qu’aurait l’engagement de la conférence des évêques de France sur l’engagement du pays dans le désarmement nucléaire- nous ont été précieux pour notre mobilisation. Merci à lui.


 

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21 février 2018 3 21 /02 /février /2018 10:46

« À un monde de violence et d’injustice, au monde de la bombe atomique, on ne saurait déjà plus rien n’opposer que la révolte des consciences, du plus grand nombre de consciences possible. » 

Georges Bernanos

Ce qui est effrayant dans la dissuasion nucléaire, au-delà des risques de mort et de destruction qu’elle fait peser sur l’humanité, c’est la déraison des hommes qui s’enferment dans une logique nihiliste de mort et de destruction. Hiroshima, Nagasaki… Par l’explosion de la Bombe, toutes les pensées de l’homme ont été saccagées…


La préparation du crime nucléaire est l’attentat le plus grave perpétré contre le caractère sacré de la vie humaine, en cela d’abord qu’elle fait peser une menace de mort sur des millions de personnes innocentes, et en cela surtout que, par elle-même, elle nie et renie la sacralité de l’humanité de l’homme, de tout l’homme et de tous les hommes. L’existence même de l’arme nucléaire consacre l’échec de toutes les morales, de toutes les philosophies, de toutes les spiritualités, de toutes les sagesses, de toutes les religions. La dissuasion nucléaire est la défaite de la raison, la défaite de la pensée, la défaite de l’intelligence. La défaite de l’humanité.


Chaque citoyen(ne) est donc sommé(e) de prendre ses responsabilités face au défi des armes nucléaires. Pour autant, parmi les citoyens certains ont une responsabilité particulière dès lors qu’ils sont les porte-parole d’une communauté qui a vocation à faire valoir ses propres exigences éthiques. C’est ainsi que les évêques qui sont les porte-parole de la communauté catholique ont une mission spécifique dans le débat politique concernant l’arme nucléaire. Leur parole reste une parole citoyenne mais leur fonction de clerc leur confère un surcroît d’autorité.


1983 : les évêques français légitiment la dissuasion nucléaire;

Dans un document adopté par la Conférence épiscopale française le 8 novembre 1983 et intitulé Gagner la paix, les évêques français d’alors justifient en bonne et due forme la dissuasion nucléaire. (Cette déclaration a été adoptée par 93 oui, 8 non et 2 abstentions) Ils s’inspirent directement de la déclaration du pape Jean-Paul II qui, dans un texte lu devant l’Assemblée plénière des Nations Unies le 11 juin 1982, affirmait : "Dans les conditions actuelles, une dissuasion fondée sur l'équilibre, non certes comme une fin en soi, mais comme une étape sur la voie d'un désarmement progressif, peut encore être jugée comme moralement acceptable » Malgré sa formulation confuse et ambiguë, cette « petite phrase » ne pouvait pas ne pas être comprise comme une justification de la dissuasion nucléaire.


« Une dissuasion est encore légitime, affirment les évêques français. C’est pourquoi les nations peuvent légitimement préparer leur défense pour dissuader les agresseurs, même par une contre-menace nucléaire. » La très officielle « note explicative » donnée à la presse par les évêques est explicite : « En ce qui concerne la stratégie de la France, l'emploi serait inacceptable : il s'agirait d'une guerre totale par frappe anti-cités. Mais la qualification morale de l'emploi rejaillit-elle sur la "simple" menace ? Il semble que non, si risquée que soit la distinction." En réalité, cette distinction n'est pas risquée, elle est insensée. La menace n'est jamais "simple", mais elle est indissolublement liée à l'emploi qui, seul, peut lui donner une éventuelle signification politique et militaire.


Le 11 novembre 1983, Jacques Gaillot "affiche" sa dissidence sur la place publique en publiant dans Le Monde un article intitulé « Pourquoi j’ai voté contre ». Il affirme : « En ces propos, aucune rumeur d'Evangile qui ouvre à l'espérance. » En effet, en justifiant la préméditation d’un crime contre l’humanité qui est le ressort même de la dissuasion nucléaire, les évêques ont nié l’Evangile.


2018 : les évêques français condamneront-ils la dissuasion nucléaire ?
Alors que j’avais rappelé à un ami la déclaration des évêques justifiant la dissuasion nucléaire, celui-ci me répond : « Puisque les évêques (de l'époque) avaient pris position en 1983 via la Conférence épiscopale française, pourquoi ceux d'aujourd'hui ne pourraient-ils pas le faire en 2018 sur cette question ? » Cette réflexion est certainement justifiée. Depuis trente-cinq ans, en effet, le totalitarisme soviétique s’est effondré, essentiellement du fait de la résistance non-violente des populations civiles de l’Europe de l’Est.


Sur le fond, le texte de 1983 atteste que réflexion critique sur la dissuasion nucléaire est de la compétence des évêques. Au demeurant, elle l’est davantage lorsqu’il s’agit de la contester que lorsqu’il s’agit de l’approuver. Cependant, il existe une différence radicale entre la déclaration de 1983 qui cautionne le pouvoir politique et militaire et une éventuelle prise de position en 2018 qui ne pourrait que le contester. L’Eglise a toujours été tentée de se montrer complaisante envers les pouvoirs établis, alors qu’elle a toujours été réticente à faire preuve d’intransigeance à leur encontre. Il n’a fallu aucun courage aux évêques pour justifier la dissuasion nucléaire. Mais il leur faudra beaucoup de force et d’audace pour la condamner. 


Pourtant, il leur suffira, comme en 1983, de reprendre à leur compte les récentes déclarations de l’évêque de Rome. Dans son discours prononcé le 10 novembre 2017 lors de la conférence pour un désarmement intégral, le pape François a dénoncé les effets pervers des « coûts de modernisation et de développement des armes nucléaires » : ils « représentent un poste de dépenses considérable pour les nations, au point de devoir laisser au second plan les priorités réelles de l’humanité souffrante : la lutte contre la pauvreté, la promotion de la paix, la réalisation de projets éducatifs, écologiques et sanitaires et le développement des droits humains ». Il a également exprimé un vif sentiment d’inquiétude en considérant « les conséquences humanitaires et environnementales catastrophiques qui découlent de n’importe quel usage des engins nucléaires ». C’est pourquoi, a-t-il précisé, « si l’on considère aussi le risque d’une détonation accidentelle de telles armes due à n’importe quel type d’erreur, il faut condamner fermement la menace de leur usage, ainsi que leur possession (c’est moi qui souligne), précisément parce que leur existence est inséparable d’une logique de peur qui ne concerne pas seulement les parties en conflit, mais tout le genre humain ». Il est remarquable que l’évêque de Rome ne s’en tienne pas à condamner la menace de l’usage des armes nucléaires, mais qu’il condamne avec la même fermeté leur « possession ». Cette condamnation est décisive car elle invite chaque Etat doté d’armes nucléaires à renoncer à leur possession. 


Une déclaration publique de la Conférence épiscopale française condamnant la possession par la France des armes nucléaires sera un événement majeur. Elle constituera l’irruption de l’Evangile dans une société matérialiste dépourvue de toute éthique, elle bousculera tous les dogmes politiques établis. Cette prise de position éthique et politique aura l’effet d’une véritable conflagration. Cette perspective risque de faire peur aux évêques. Mais se taire ce serait une nouvelle fois nier l’Evangile. Nous voulons donc croire qu’ils sauront surmonter leur peur pour être fidèles à l’espérance.
Selon Jean Lurçat, c’est seulement lorsque les hommes auront eu la sagesse de libérer la terre de l’armes nucléaire qu’il sera possible de célébrer la vie et de chanter le monde : “Ce Chant du Monde ne sera plausible, possible, le monde n’osera aborder le Chant, que lorsque la Grande Menace de cette immense, immonde pustule de la Bombe, sera, d’un commun accord, arrachée de la chair des hommes. ”

Jean-Marie MULLER

* Philosophe et écrivain.
www.jean-marie-muller.fr


Dernier ouvrage paru : La violence juste n’existe pas / Oser la non-violence, le Relié.

 

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13 septembre 2017 3 13 /09 /septembre /2017 21:39

Jean-Marie Muller *


Ainsi donc, le Président Macron a cru devoir faire de la justifications de l'arme nucléaire un événement majeur du début de son quinquennat. Le 4 juillet, il se fait hélitreuiller à bord du Terrible, un des sous-marins nucléaires lanceurs d'engins (SNLE) de Ile Longue dans la rade  de Brest et, le 20 juillet, il se rend sur la base aérienne  d'Istres qui abrite la composante aéroportée constituée des missiles air-sol de moyenne portée améliorée (ASMPA) installés sur des Mirage dont la visibilité traduit, selon le ministère des armées, la " détermination française à agir ". Un pareil affichage en faveur de la dissuasion nucléaire, qui peut paraître lisse en apparence, est lourd de graves ambiguïtés dont Emmanuel Macron ne semble pas conscient.

Sous-marin nucléaire Photo internet

Sous-marin nucléaire Photo internet

 


En 1969, alors qu'il était encore un adversaire résolu de l'arme nucléaire, François Mitterrand, évoquant le choix du général de Gaulle en faveur de la dissuasion n'hésite pas à affirmer que celui-ci est "en retard d'une stratégie et d'une morale". Il poursuit : "La sécurité sur le thème "à chacun sa bombe atomique" annonce la guerre certaine et la mort pour tous, le vainqueur étant celui qui meurt un quart d'heure après l'autre."


Pour sa part, quelques années plus tard, à l'occasion de l'élection présidentielle de 1981, François Mitterrand se mettra lui-même délibérément en retard pour pouvoir se rallier à l'Etat nucléaire. 


Le président Giscard d'Estaing fera lui-même l'expérience qu'en possédant l'arme nucléaire, il est "en retard d'une stratégie". Dans ses mémoires, il raconte que dans l'hypothèse où la France devrait faire face à une agression soviétique la doctrine l'inviterait à procéder à un tir nucléaire tactique sur les armées soviétiques, provoquant ainsi une escalade nucléaire qui menacerait de détruire la France. Dans ces conditions, le Président français conclut qu'il n'a pas d'autre choix que de ne pas donner l'autorisation de tir. Il conclut, incluant cette fois le domaine de la dissuasion stratégique : "Quoi qu'il arrive, je ne prendrai jamais l'initiative d'un geste qui conduirait à l'anéantissement de la France".


Pour sa part, Emmanuel Macron se trouve effectivement en retard "d'une stratégie et d'une morale". La préméditation d'un crime contre l'humanité qui structure la dissuasion nucléaire implique la négation et le reniement  des valeurs morales qui fondent la civilisation. Peut-être faut-il reconnaître au Président français une circonstance atténuante du fait que les clercs, qu'ils soient laïcs ou religieux, ont trahi leur mission, qui est de promouvoir ces valeurs, en s’accommodant eux-mêmes de l'arme nucléaire. Il existe une réelle indécence à dépenser des milliards d'Euros à une œuvre de mort qui nous menace plutôt qu'elle nous protège, au détriment de nombreuses œuvres de vie qui se trouvent en manque de moyens.


François Mitterrand aurait pu préciser que le général de Gaulle était également "en retard d'une démocratie". Il est remarquable qu'Emmanuel Macron ait décidé de justifier l'arme nucléaire en dehors de tout débat démocratique. Pas un seul député n'est intervenu au sein de l'Assemblée Nationale pour mettre en doute le choix nucléaire du Président de la République. Les Insoumis eux-mêmes se sont soumis sans oser la moindre contestation. Et où sont les écologistes dans cette affaire, alors même que l'arme nucléaire devrait susciter de leur part une opposition irréductible ? Il est vrai qu'un ministre d'Etat est censé les représenter au sein du gouvernement, mais, précisément, il s'agit d'un ministre de l'Etat et non pas de l'écologie.


Face à la menace terroriste


D'une manière plus générale, prétendre que face à la menace terroriste, la France est en guerre, c'est encore être en retard d'une stratégie et d'une morale. Le terrorisme n'est pas la guerre. La caractéristique de la stratégie terroriste est de permettre, par les moyens techniques les plus simples, de contourner et de mettre en échec les dissuasions militaires dont les moyens techniques sont les plus sophistiqués. Alors que les grandes puissances industrielles prétendent détenir les armes qui rendent inviolable leur sanctuaire national, l'arme des terroristes vient porter la violence, la destruction et la mort au cœur même de leurs villes. Le terrorisme vient prendre à revers la défense des sociétés modernes en sorte que les armes les plus puissantes s'avèrent inutiles et vaines aux mains des décideurs politiques et militaires. La stratégie du terrorisme pose donc comme postulat le refus de la guerre. Ce qui caractérise la guerre, c'est la réciprocité des actions décidées et entreprises par chacun des deux adversaires. Or, précisément, face à l'action des terroristes, aucune action réciproque ne peut être entreprise par les décideurs adverses. Ceux-ci se trouvent dans l'incapacité de répondre coup pour coup à un adversaire qui se dérobe. C'est donc se fourvoyer que de prétendre combattre le terrorisme en faisant la guerre.

 
Nous ne pouvons pas nous dispenser de chercher à comprendre le terrorisme, sous le prétexte fallacieux que ce serait déjà commencer à le justifier. En réalité, comme toute stratégie d'action violente, le terrorisme a sa propre rationalité politique. Et il est vain de la nier en brandissant son immoralité intrinsèque. Pour éradiquer le terrorisme, c'est-à-dire pour le déraciner, il faut d'abord s'efforcer de comprendre quelles sont les racines historiques, sociologiques, idéologiques et politiques qui l'alimentent. Dès lors que la dimension politique du terrorisme sera reconnue, il deviendra possible de rechercher la solution politique qu'il exige. En définitive, pour vaincre le terrorisme, ce n'est pas la guerre qu'il faut faire, mais la justice qu'il faut construire.

 

Face à l'extrême tragique de la guerre et du terrorisme, le réalisme ne devrait-il pas nous conduire à réfléchir enfin sur les possibilités offertes par la stratégie de l'action non-violente ? Opter pour la non-violence, c'est précisément refuser d'imiter la violence des violents par une réaction symétrique qui crée un engrenage dans lequel les adversaires se trouvent enfermés dans une spirale de violence. La non-violence vient rompre le cycle des ressentiments, des revanches et des vengeances et devrait nous permettre de rattraper nos retards.
Certes, la non-violence est un risque : elle est le risque même de l'espérance.

* Membre fondateur du Mouvement pour une Alternative Non-violente (MAN)
Auteur de Libérer la France de l’arme nucléaire, 2014, Chronique sociale.
www.jean-marie-muller.fr
 

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26 juillet 2017 3 26 /07 /juillet /2017 20:00

Lettre de Jean-Marie MULLER* du 21 juillet 2017

 

 

Lors de son discours au Congrès de Versailles, Le 3 juillet 2017, Emmanuel Macron a présenté les principes qu’il entend mettre en œuvre pour construire la paix dans « un monde dangereux ». « Notre environnement, précise-t-il, y compris notre environnement proche, se caractérise par l’accumulation des menaces. (…) Les mouvements terroristes se développent dans de multiples régions avec des moyens qui augmentent leur capacité de nuisance. » Il souligne alors que « notre outil militaire revêt dans ces circonstances une importance majeure » en précisant que la dissuasion est « la clé de voûte de notre sécurité ». Cette formule se voudrait  décisive, mais elle reste une affirmation idéologique qui risque fort de n’être que formelle et de n’avoir aucune prise sur la réalité des menaces qui pèsent sur notre société.

 

 

Le lendemain, alors même que le Premier Ministre présentait la politique de son gouvernement devant l’Assemblée Nationale, le Président de la République se faisait hélitreuiller à bord du Terrible, un des sous-marins nucléaires lanceurs d’engins (SNLE) de la base de l’Île Longue dans la rade de Brest. Il tenait ainsi à « rencontrer celles et ceux qui oeuvrent à la nécessaire permanence de la dissuasion nucléaire ».  Une séquence de lancement simulé était au programme, mais on ne nous a pas dit quel était le scénario envisagé. On peut s’interroger sur l’opportunité d’une telle initiative à un tel moment. En venant s’enfermer dans un sous-marin nucléaire, le Président  de la République se faisait prisonnier du monde ancien que, par ailleurs, il prétend combattre.

 

 

24 heures après la démission du chef d’état-major des armées, Emmanuel Macron s’est rendu sur la base aérienne 125 d’Istres qui est un maillon essentiel de la dissuasion française. Mise en œuvre au cœur de la guerre froide, cette base abrite la composante aéroportée constituée des missiles ASMPA (missiles air-sol de moyenne portée améliorée) installés sur des Mirage dont la visibilité traduit, selon le ministère  des armées, la « détermination française à agir ». Au cours de son intervention, le Président déclare : « La dissuasion nucléaire est au cœur de notre défense, elle est la garantie de nos intérêts vitaux et j’en suis le garant. » Et il rappelle l’effort financier de l’Etat en faveur des investissements militaires : « Dès 2018, nous augmenterons notre effort de 20 %. Le budget sera porté à 34,2 milliards d’euros dès 2018. Aucun budget autre que celui des armées ne sera augmenté. » Mais l’immense paradoxe c’est qu’une crise majeure soit survenue à propos d’une réduction de 180 millions du budget des armées, alors que des milliards sont consacrés à l’arme nucléaire qui s’avère parfaitement incapable d’éradiquer les menaces terroristes. À aucun moment, dans aucun conflit, non seulement l’emploi mais la menace même de l’arme nucléaire ne sauraient être envisagés. Ils sont véritablement im-pensables, étant donné l’ampleur de la catastrophe humanitaire qui serait provoquée par tout usage de cette arme de destruction aveugle.

 

 

On connaît l’affirmation du Président François Mitterrand : « L’arme nucléaire, c’est moi ! ». Pour sa part, Emmanuel Macron entend faire comprendre au monde entier que « l’arme nucléaire, c’est lui !. » Cette priorité politique et stratégique affichée par le Président de la République en faveur de l’arme nucléaire est d’une gravité exceptionnelle qui est décisive pour mettre en échec la politique de renouveau qu’il voudrait conduire. Elle constitue une faute et une erreur qui impliquent la négation et le reniement des valeurs éthiques qui fondent la civilisation. Et cela d’autant plus qu’elle semble bénéficier d’un consensus populaire. Au demeurant, il ne s’agit que d’un consensus par défaut dès lors qu’aucun débat démocratique n’accompagne ce choix. Et, pendant ce temps, les clercs, qu’ils soient religieux ou laïcs, continuent de trahir leur mission en s’accommodant de la préméditation du crime contre l’humanité qui fonde la dissuasion nucléaire.

 

 

« Le prestige, déclarait M. Ban Ki-Moon, le Secrétaire général des Nations Unies, lors de l’allocution qu’il prononça à Hiroshima le 6 août 2010, appartient non pas à ceux qui possèdent des armes nucléaires, mais à ceux qui y  renoncent. »  Il est mal-heureux que le Président Macron se trompe de prestige.

 

 

* Philosophe et écrivain

Auteur  de Libérer la France des armes nucléaires, 2014, Chronique Sociale.

www.jean-marie-muller.fr

E. Macron au Congrès de Versailles

E. Macron au Congrès de Versailles

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1 janvier 2017 7 01 /01 /janvier /2017 09:24
Le Pape François, place Saint Pierre, lâche une colombe symbole de paix - RV

Le Pape François, place Saint Pierre, lâche une colombe symbole de paix - RV

Au début de cette nouvelle année, je présente mes vœux sincères de paix aux peuples et aux nations du monde, aux Chefs d’État et de Gouvernement, ainsi qu’aux responsables des communautés religieuses et des diverses expressions de la société civile. Je souhaite la paix à chaque homme, à chaque femme ainsi qu’à chaque enfant et je prie pour que l’image et la ressemblance de Dieu dans chaque personne nous permettent de nous reconnaître mutuellement comme des dons sacrés dotés d’une immense dignité. Surtout dans les situations de conflit, respectons cette « dignité la plus profonde » et faisons de la non-violence active notre style de vie.

 

Voilà le Message pour la 50ème Journée Mondiale de la Paix. Dans le premier, le bienheureux Pape Paul VI s’est adressé à tous les peuples, non seulement aux catholiques, par des paroles sans équivoque : « Finalement [a] émergé d'une manière très claire le fait que la paix était l'unique et vraie ligne du progrès humain (et non les tensions des nationalismes ambitieux, non les conquêtes violentes, non les répressions créatrices d'un faux ordre civil) ». Il mettait en garde contre le « péril de croire que les controverses internationales ne peuvent se résoudre par les voies de la raison, à savoir par des pourparlers fondés sur le droit, la justice et l'équité, mais seulement au moyen des forces qui sèment la terreur et le meurtre ». Au contraire, en citant Pacem in terris de son prédécesseur saint Jean XXIII, il exaltait « le sens et l'amour de la paix, fondée sur la vérité, sur la justice, sur la liberté, sur l'amour ». L’actualité de ces paroles, qui aujourd’hui ne sont pas moins importantes et pressantes qu’il y a cinquante ans, est frappante.

 

À cette occasion, je souhaite m’arrêter sur la non-violence comme style d’une politique de paix et je demande à Dieu de nous aider tous à puiser à la non-violence dans les profondeurs de nos sentiments et de nos valeurs personnelles. Que ce soient la charité et la non-violence qui guident la manière dont nous nous traitons les uns les autres dans les relations interpersonnelles, dans les relations sociales et dans les relations internationales. Lorsqu’elles savent résister à la tentation de la vengeance, les victimes de la violence peuvent être les protagonistes les plus crédibles de processus non-violents de construction de la paix. Depuis le niveau local et quotidien jusqu’à celui de l’ordre mondial, puisse la non-violence devenir le style caractéristique de nos décisions, de nos relations, de nos actions, de la politique sous toutes ses formes !

 

Pour lire la suite du message : un clic vers Radio Vatican

Pour lire le message de Jean-Marie Muller au sujet de ce message : Promouvoir la non-violence, un clic vers son site.

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19 octobre 2016 3 19 /10 /octobre /2016 08:24

Sur son blog, Alain Refalo retrace les 50 ans d'engagements de Jean-Marie MULLER :

 

Il y a 50 ans, le 10 octobre 1966, Jean-Marie Muller donnait sa toute première conférence publique à Orléans sur le thème « La violence et l’évangile » dans le cadre d’une rencontre oecuménique à laquelle participait notamment l’évêque d’Orléans Guy Riobé et le pasteur Miroglio, responsable de l’Eglise réformée d’Orléans. Jeune professeur de philosophie, il est alors âgé de 26 ans, Jean-Marie Muller y faisait le constat que « le monde est en état de violence » et qu’ « il est menacé par la violence jusque dans son existence même ». Il posait alors cette question qui demeure toujours d’actualité : « Face à cela, que devons-nous faire, que pouvons-nous faire ? » C’est précisément à ces questions cruciales que Jean-Marie Muller ne cesse de réfléchir depuis cinq décennies en s’efforçant de relever le formidable défi que nous lance la non-violence.

 

 

Jean-Marie Muller, 50 ans d’engagements au service de la non-violence

Nous vous invitons vivement à lire la totalité de cet article sur le blog d'Alain REFALO. Clic ! 

 

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  • : Lulu en camp volant
  • Lulu en camp volant
  • : Lucien Converset, dit Lulu est prêtre. A 75 ans, il est parti le 25 mars 2012 avec son âne Isidore en direction de Bethléem, où il est arrivé le 17 juin 2013. Il a marché pour la paix et le désarmement nucléaire unilatéral de la France. De retour en France, il poursuit ce combat. Merci à lui ! Pour vous abonner à ce blog, RDV plus bas dans cette colonne. Pour contacter l'administrateur du blog, cliquez sur contact ci-dessous.
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Désarmement nucléaire

Journée de jeûne pour demander le désarmement nucléaire unilatéral de la France,

tous les 1ers lundis du mois de 14h à 17h en hiver, de 16h à 18h en été, à Dampierre (39) avec un temps de partage et de réflexion animé par Lulu.

Et commémoration des bombardements d'Hiroshima et Nagasaki entre les 6 et 9 août, chaque année.

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