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29 janvier 2015 4 29 /01 /janvier /2015 11:40

Jeudi 29  janvier 2015

 

Un jour, pendant que nous nous promenions avec des enfants de l’Association Floriane, dans les coteaux des environs de Salins, un orage très violent nous était tombé dessus. Cela avait beaucoup tendu nos relations les uns avec les autres. Chacun avait eu tendance à se comporter en «  Sauve qui peut », en abandonnant à leur sort les plus faibles, ceux qui avaient du mal de marcher. Nous avions réussi cependant à nous réfugier avec nos ânes dans une maison qui est sur le flanc du Val d’Héry, la ferme d’Arloz, chez Bernard.


Très sympathique, cet homme nous avait dit : « Entrez ! Venez vite vous mettre à l’abri ! En attendant que le gros de l’orage se passe, vous allez boire quelque chose de chaud. Vous reprendrez ensuite votre chemin … » Cet accueil nous avait fait du bien. Une grande part de la tension agressive qui régnait entre nous était retombée.

 

Nous avions longuement et profondément causé avec cet homme. Il avait pris le temps de nous recevoir. Puis l’orage s’était un peu calmé au dehors et aussi entre nous. Bien que le ciel soit encore sombre, nous décidions de reprendre le chemin afin d’arriver à notre lieu de ralliement avant la tombée de la nuit. C’est alors que Bernard nous dit : » Oh, regardez ! Voila que se dessine un arc en ciel. Vous le voyez, entre le Fort Belin et le Fort Saint André. »

 

 

Oh ! Comme c’était beau ce qui se réalisait sous nos yeux ! L’arc en ciel reliait les deux forts. C’était comme une anse de panier, soutenant la ville de Salins blottie dans le fond de la vallée.

 

Je me souviens aujourd’hui que Bernard au moment de partir, nous avait invité en souriant à ce que nous allions chercher au pied de l’arc en ciel : « Vous creuserez. Vous allez y découvrir des trésors, ne passez pas à côté sans chercher »

 

Après l’avoir salué et remercié pour la manière dont il nous avait accueillis, nous nous étions dirigés en direction du pied de l’arc en ciel, en dessous du Fort Belin. C’était justement notre point de ralliement : le Rayon de Soleil.

 

C’était merveilleux alors, comment nous avions continué à traverser l’orage qui empestait notre groupe. Il me revient que nous avions cherché et trouvé la manière d’aménager l’allure de notre marche, ainsi que l’ambiance de notre équipée. Il était devenu essentiel que la solidarité imprègne intensément nos comportements, les uns vis-à-vis des autres. Nous nous rendions compte que, pour que l’ensemble de notre groupe aille bien, il nous fallait d’abord être attentifs aux plus petits, aux plus fragiles, à celles et ceux qui avaient le plus de difficulté de marcher. L’orage avait fait surgir en nous des agressivités les uns à l’égard des autres. Ce n’était pas très beau comme nous nous étions dévisagés au lieu de nous envisager. N’étant pas tous du même quartier, ni non plus de même niveau social, la façon dont nous étions habillés, avait fait surgir de nos bouches, des moqueries les uns envers les autres : « Oh ! T’as vu comme il est fringué ! … T’aurais pu trouver d’autres  godasses pour venir marcher avec nous … La prochaine fois, tu trouveras un autre anorak que celui que t’as sur le dos ! » C’était même allé jusqu’à des mots et des gestes durs et violents par rapport à nos origines, concernant nos mamans.

 

Grâce à notre halte chez Bernard et son appel à creuser au pied de l’arc en ciel, les membres de l’équipe animatrice et moi, nous étions intervenus pour découvrir et dire qu’il y a des paroles et des attitudes qu’il faut savoir nous interdire les uns envers les autres lorsque l’atmosphère est orageuse. En effet, ça peut devenir explosif. Particulièrement quand ça touche à l’image que nous avons de notre Maman. Nous devons nous interdire d’exprimer ce que l’on est tenté de dire des mamans des autres. C’est d’elles dont nous venons, d’où nous sommes originaires. Il est tellement délicat de toucher à cet essentiel. Il est sage de poser là, des interdits.

 

C’était beau ce que nous mettions à jour en reprenant notre chemin en direction du pied de l’arc en ciel. Que de trésors nous découvrions !

 

Je me souviens même des mots que l’un des enfants, Olivier, juché sur le dos de l’âne Isidore avait dit à l’un des plus petits qui était très fatigué : » Viens Maxime, je te donne ma place » il était alors descendu de l’âne et avait aidé Maxime à grimper à son tour sur le dos d’Isidore pour qu’il y trouve repos et joie. J’avais alors écrit sur mon cahier, que j’avais tiré de ma poche de veste : « Merveille sur un dos d’âne. » Nous arrivions devant la Beline. Le ciel se dégageait. Nous chantions notre joie. Simone notre vieille amie était sortie sur le pas de la porte de sa maison, pour nous donner à nous des chocolats et des carottes à nos ânes. Nous étions juste au pied de l’arc en ciel. Comme il faisait beau et bon à ce moment là et en ce lieu. De manière rigolote, nous nous étions creusés les méninges pour trouver comment faire, afin que chacun de nous découvre sa place, en commençant par les plus petits. Il me revenait les paroles du Père Joseph Wrezinski que Bernard et Colette Berthet m’avaient apprises à Champdivers au sein du Mouvement ATD quart Monde : « Commençons à faire de la place pour les plus faibles, comme ça on sera sûrs de n’oublier personne »

 

Aujourd’hui dans l’ouragan de  violence qui vient de nous tomber dessus en France, les 7, 8 9 janvier, nous prenons un peu plus conscience que des drames comme celui ci, s’abattent depuis plusieurs décennies en de multiples endroits de la terre.

 

En certains lieux de la planète terre, ce sont des cyclones de violence qui déchirent des pans entiers de notre humanité : Kobané à la frontière turco-syrienne, mis à feu et à sang par Daesch, Nigéria et Niger où des populations entières subissent pillages, viols et tueries de toutes sortes par Boko Haram et tant d’autres endroits où des personnes souffrent. Une question doit se poser à nos consciences. Il y a des origines à toutes ces violences. Ayons la lucidité et le courage de remonter en amont de ces guerres larvées, jusqu’aux violences premières. Nous en décelons quelques unes. L’omniprésence de l’idole argent. Ne devons nous pas entreprendre, à commencer par moi-même, de chercher et trouver des moyens pour arrêter de tout sacrifier à cette idole. Ne démissionnons pas de nos projets de construire notre humanité, mais démunissons nous de manière unilatérale, des violences qui barrent la route au souffle de l’Esprit : la fabrication et le commerce de tout armement, et particulièrement du nucléaire.

 

Comme nous y appelle sans cesse Jean-Claude Guillebeaud : « Arrêtons de foncer à grande vitesse de manière parallèle les uns et les autres, car, c’est alors que nous nous éloignons les uns des autres, nous nous individualisons. Prenons le temps de causer, de creuser au pied de nos arcs en ciels, de nous écouter, en donnant valeur à la parole de l’autre. Comme il fait bon de déceler dans ce que l’autre vient de nous dire, la part de vérité qui y est cachée, laissant à l’autre le temps de nous l’offrir. Evitons de  nous croire obligés d’aller jusqu’à caricaturer et tourner en dérision l’attitude et la parole de l’autre, sous le prétexte de la liberté d’expression. C’est la transversalité.

 

Dans beaucoup d’endroits de la planète, surgissent des arcs en ciels, des groupes de gens, qui en raison de leur manière de vivre, nous signifient que nous pouvons éviter de nous laisser engloutir dans nos ouragans de violence et de détresse. Il vient d’arriver un de ces arcs en ciels à nos yeux de lecteur, ce sont : Lettres à un ami fraternel, de Christian de Chergé, le prieur de Tibhirine aux éditions Bayard. Ce livre vient de paraitre il y a 15 jours, des amis me l’ont offert, c’est un merveilleux outil pour creuser au pied de l’arc en ciel qu’est Tibhirine, afin de sortir de nos violences pour nous libérer les uns grâce aux autres. Lorsqu’il y a un an, j’étais allé grâce à des amis, à Tibhirine en Algérie, j’avais deviné que la mort des 7 moines n’avait pas fini de nous mener à la vie. Je repensais à notre ami Gaby Maire, qui en 1989, quelques temps avant d’être assassiné au Brésil disait : « Je préfère une mort qui mène à la vie, plutôt qu’une vie qui mène à la mort ».

 

Quelques mois avant d’être emmenés prisonniers avec ses compagnons, Christian de Chergé écrivait à Maurice Borrmans (qui avait été son professeur à l’institut pontifical d’Islamologie de Rome) : « Chacun se sait voué au même témoignage d’amour auprès de ce peuple meurtri et trompé… Il y a ce qui mûrit en secret et qui fait que rien ne sera plus comme avant, y compris dans l’approche de l’Islam. »

 

Depuis que j’ai ce livre entre les mains, je dévore chaque jour quelques unes de ces lettres de Christian, afin de me nourrir pour le combat journalier et non violent contre ce qui n’est pas juste. J’y trouve une multitude de connivences avec ce qu’un certain galiléen nommé Jésus, a dit et fait dans le pourtour de la montagne qui nous permet de contempler la mer de Tibériade. C’est comme un arc de lumière afin de nous arrêter d’assombrir la situation de notre humanité : « On vous a dit : Aimez vos petits copains mais haïssez vos ennemis … il faut tous les descendre … Eh bien, moi je vous dis : Aimez vos ennemis, priez pour ne pas entrer dans la tentation de croire que c’est par la fabrication et le trafic des armes que vous arriverez à vous en débarrasser (Matthieu 5, 43-44 et 26, 41)

 

arc-en-ciel.jpg

 

Il arrive dans nos ciels d’orage, qu’à côté d’un arc en ciel en surgisse un second. En même temps que la parution de ce livre, nous arrivait par Internet un très profond document de Jean-Marie Muller : « Face à la tragédie de Charlie Hebdo » Ainsi, je peux écrire à Jean-Marie : « Merci pour ce bel arc en ciel dans nos épreuves que tu viens de nous faire parvenir. Comme les lettres de Christian de Chergé, comme l’Evangile de la non violence, aujourd’hui, vous nous permettez de creuser au fond de nos êtres, et de trouver les ressources pour empêcher nos malheurs. Nous sommes appelés à nous démunir de nos pouvoirs et de nos forces agressives, de nos armements de manière unilatérale et à faire confiance à la conjonction de nos trésors d’amour, de justice et de vérité.

 

Au moment même où je finis d’écrire cette lettre, il nous apparait encore un autre arc en ciel : c’est ce que fait et écrit Latifa, la maman de la première victime de Mohammed Merah. En allant rencontrer dans les cités et les écoles les jeunes, Latifa les aide à trouver des chemins de fraternité en abandonnant les tentations de violence.

C’est par la lecture d’un article écrit par Jacques et Elisabeth Lamy et paru ce matin même dans la Voix du Jura, que m’apparait la lumière de cet arc en ciel.

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commentaires

D
Bonjour,<br /> <br /> merci pour ces infos, toujours utiles pour nous. Lors de notre présence mensuelle du premier vendredi devant le Ministère de la Défense pour le désarmement nucléaire, nous parlons aussi de votre<br /> jeûne mensuel le lundi qui précède.<br /> <br /> Ce serait bien d'informer les adeptes de votre blog qu'ils peuvent si ils sont sur la région parisienne venir à cette présence (qui est un jeûne pour plusieurs d'entre nous).<br /> <br /> Merci pour votre attention à développer une conscience toujours plus grande pour le désarmement nucléaire.<br /> <br /> Cordialement,<br /> <br /> <br /> Dominique Lalanne<br /> <br /> ------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------<br /> <br /> A l'appel de la Maison de Vigilance :<br /> <br /> une action à Paris ouverte à tous<br /> <br /> ACTION DE VIGILANCE POUR L’ABOLITION DES ARMES NUCLÉAIRES<br /> Présence et jeûne devant le Ministère de la Défense<br /> (chaque mois depuis 10 ans)<br /> -------------------------<br /> <br /> Vendredi 6 février 2015<br /> <br /> • de 8 h à 9 h, place J.-Bainville (M° Solférino)<br /> Tenue noire vivement souhaitée !<br /> • entre 9 h et 12 h, rdv au bistrot d’en face<br /> (côté n° pairs du bd. St-Germain) pour bilan…<br /> • de 12 h à 13 h, rdv 12 h sur terre-plein angle<br /> bd St-Germain et rue Université.<br /> • de 16 h à 17 h, pl. J.-Bainville (M° Solférino)<br /> <br /> Contact : Dominique Lalanne, 06 32 71 69 90<br /> <br /> Photos : cliquer ICI<br /> <br /> (mettre le lien :<br /> <br /> https://plus.google.com/photos/113137942473092853019/albums?banner=pwa<br /> <br /> --------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------
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  • : Lulu en camp volant
  • Lulu en camp volant
  • : Lucien Converset, dit Lulu est prêtre. A 75 ans, il est parti le 25 mars 2012 avec son âne Isidore en direction de Bethléem, où il est arrivé le 17 juin 2013. Il a marché pour la paix et le désarmement nucléaire unilatéral de la France. De retour en France, il poursuit ce combat. Merci à lui ! Pour vous abonner à ce blog, RDV plus bas dans cette colonne. Pour contacter l'administrateur du blog, cliquez sur contact ci-dessous.
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