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11 février 2016 4 11 /02 /février /2016 20:24

Alors que Lulu prépare un nouveau voyage à Midelt pour emporter broyeur et pressoir pour presser les pommes de la non-violence voici la suite des textes qu'il a écrit en septembre dernier.

 

MIDELT, le mercredi 9 septembre 2015

 

« ON VA SE TUTOYER »

parole créatrice d'un véritable PASSAGE A NIVEAU

 

Pendant ce merveilleux séjour au Maroc (du 8 au 22 septembre 2015 ) comme le gingko biloba de Dampierre m'avait interpellé à le faire l'an dernier, j'ai ramassé, pour les mettre dans mon sac à dos, une multitude de petites feuilles d'or durant mes rencontres avec les moines du monastère de la KASBAH MERIEM et les habitants de la cité de Midelt. J'en ai fait un cahier. C'est merveilleux ce que je trouve d'écrit en chacune de ces feuilles. Je vais continuer à vous les partager. En voici quelques-unes du 2ème jour.

 

Nous sommes au matin du mercredi 9 septembre. Nous venons de célébrer la messe avec Jean- Pierre Schumacher, survivant de Tibhirine, Jean-Pierre Flachaire, le prieur venant d'Aiguebelle, Antoine qui chante les psaumes comme si ils habitaient tout son être. A certains moments, en voyant Antoine et en l'entendant, on a l'impression qu'il va se mettre à danser, et on a envie de faire de même. Il y a aussi José-Luis qui vient de Valencia en Espagne. C'est dans cette ville que j'étais parti avec ma 2 CV baptiser la petite Estrella Torres en septembre 1973. Et le 5ème moine de ce monastère cystercien est Nuno, novice originaire du Portugal. Il parle beaucoup mais rien qu'avec son sourire. C'est dans cette petite communauté d'hommes, qu'en ce début septembre, je m'entends appeler à entrer avec comme guide le frère Benoit de l'Abbaye d'Acey.

 

 

Lulu et le frère Benoît

Lulu et le frère Benoît

J'ai contemplé hier soir durant le chant des complies le visage de ces 5 hommes, particulièrement celui de Jean-Pierre Shumacher en raison du témoignage qu'il nous donne de Tibhirine. Rien qu'en regardant son visage, je voyais celui des 7 moines de Notre Dame de l'Atlas. Avec une humble audace, celle-là de tout être qui a conscience qu'il est enfant de Dieu, j'avais dit : » Cet homme a beaucoup, beaucoup, beaucoup à m'apprendre de la vie, de la mort, et de la résurrection de nos êtres, du sien, du mien Lucien, de celui de ses compagnons, et aussi de votre être à chacun de vous tous avec qui nous avons la joie de nous rencontrer »
 

Après la messe, le petit déjeuner, l'heure de Tierce, nous nous retrouvons comme convenu entre Jean-Pierre Shumacher et moi, dans une pièce adjacente à la chapelle. Ce « rendez-vous « , surtout à cause d'un petit mot prononcé par Jean-Pierre au tout début de la rencontre, va produire un moment merveilleux, où les deux personnes que nous sommes, vont se tendre l'une vers l'autre et se rendre l'une à l'autre. Un véritable « rendez-vous »

 

En effet, je viens de dire à Jean-Pierre, dans l'immédiat de la rencontre : « Qu'est ce que je suis heureux de vous voir Jean-Pierre, de vous rencontrer et de pouvoir causer avec vous. Je sens que je vais pouvoir vous écouter me raconter ce que vous avez vécu avec les frères de Tibhirine ... » C'est alors que Jean-Pierre me dit, comme ça, d'emblée : « ON VA SE TUTOYER ! »

 

Oh, ce que ta parole m'a touché Jean-Pierre ! Tu venais par tes mots, d'ouvrir toutes grandes des barrières qu'il n'y avait que toi qui pouvais les ouvrir. Tu venais de rendre possible la communication entre nous de manière inouïe, parce que tu en faisais une communication non violente. La manière dont tu me disais ces mots nous rendait frères l'un de l'autre. Ces mots ne pouvaient venir que de toi : « on va se tutoyer » Tu m'ouvrais les barrières comme faisait Madame Orsat la garde barrière du passage à niveau de la voie SNCF à Dampierre, lorsque enfant, je conduisais notre troupeau de vaches dans la pâture qui se trouvait de l'autre côté de la voie. Cette femme m'ouvrait le passage à niveau. Jean-Pierre, tu nous mettais toi et moi à niveau l'un de l'autre. Ça n'arrêtait pas mon regard qui me faisait « te voir supérieur à moi » (Phi. 2, 3.) Tu continuais d'être quelqu'un qui a beaucoup de trésors de non-violence à me faire découvrir. En cela consistait ta supériorité. Ça nous transformait l'un et l'autre. Tu as vécu des choses que je n'ai pas vécues et qui me font t'estimer, te considérer, t'aimer. Mais voilà que ta parole me touchait étonnamment. Elle devenait créatrice, elle me rentrait dans la peau, « Ta parole se faisait chair » (Jo. 1. 14 ), dans ma chair, dans mon être. Jean-Pierre, tu nous mettais à niveau l'un de l'autre. Nous allions pouvoir communiquer tout autrement que s’il n'y avait pas eu cette parole, ces mots : « On va se tutoyer. » Tu te démettais de ton pouvoir. Tu t'en démunissais pour le rendre serviteur« Tu ne retenais pas le rang qui t'égalait à Dieu » (Phi 2, 6) Tu sortais de ce rang où tu te trouvais pour venir me chercher là où j'en étais. Je ne saurais pas dire si tu t'abaissais à mon niveau ou si tu m'élevais au tien. Peut-être un peu des deux.

 

Ça me rappelait ce qui s'était passé de totalement semblable entre André Depierre et moi au printemps de l'année 1966 au tout début où je devenais prêtre. La 1ère fois où j'étais allé voir à Montreuil cet homme, originaire de Vadans dans le Jura, de 15 ans mon ainé. 

Prêtre ouvrier, fondateur de la mission de Paris en janvier 1944, avec Henri Godin né à Audeux dans le Doubs, lui aussi originaire du Jura par ses parents. André m'avait dit « On va se tutoyer » dès le début de notre première rencontre. Déjà à ce moment-là j'avais expérimenté quelque chose de fondamental dans la dimension relationnelle de ma vie d'homme et je m'étais dit : « N'oublies pas ce que t'a donné André par sa parole … et fais de même. » J'avais un jour découvert la source de cette communication de la non-violence dans les psaumes, lorsque celui avec qui nous commençons de nous relier nous permet de nous libérer parce qu'il crée un passage à niveau avec nous : « Mon allié est devenu mon libérateur »(PS 143, 2 )

 

Rien n'avait été enlevé de l'estime que j'éprouvais pour Jean-Pierre. Mais un verrou venait de sauter, une barrière empêchante disparaissait d'entre nos êtres, et elle ne se refermerait jamais : ce qui donnait autorité ne s'était pas effacé, mais allait pouvoir entrer en action et réaliser son œuvre. Il se passait comme sait si bien nous le faire deviner René Girard, quelque chose de semblable à ce qui se passe entre le PERE et le FILS. L'ESPRIT-SAINT peut entrer en action, ça peut souffler entre eux, parce que le Père et le Fils sont à niveau. Ils ont fait de leur POUVOIR, un AMOUR pour TOUJOURS.

 

Comme ce serait libérant de nous débarrasser de tout ce qui est très empêchant dans l'exercice de ce satané pouvoir. Nous y tenons tant les uns par rapport aux autres, qu'il nous joue de vilains tours, parce que nous nous maintenons à l'exercer dans la violence accaparante, au lieu de le vivre de façon servisante. Et comme nous le chantons le dimanche soir aux complies ( il n'est jamais trop tard de le réaliser) : « Nous expérimenterons que plus nous ôterons les barrières entre nous, plus nous nous approcherons les uns des autres, plus nous serons à niveau les uns avec les autres, davantage nous deviendrons libres. » (PS 90, 14)

 

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1 février 2016 1 01 /02 /février /2016 11:06

CITEAUX , le 14 janvier 2016

 

«  VOICI QU'UN AUTREMENT DEVIENT POSSIBLE » 

 

Depuis quelques mois je ne voyais plus rien de mon œil gauche. J'avais du mal de m'y faire. Ne plus rien voir de la gauche ça déséquilibre la vie ! «  Tu devrais aller te faire opérer » me disait-on. Ça y est, j'en reviens. Maintenant que voilà installé dans mon œil gauche un cristallin tout neuf par la doctoresse Catherine Creuzot et son équipe, mon œil droit me dit : «  Qu'est ce que ça va mieux pour la conjugaison. Nous allons à nous deux te faire voir des réalités que tu avais peine de voir ces temps passés. »

 

En effet, le jour de la plantation du Ginkgo Biloba à Dampierre le 9 janvier 2016, il y a des gens que je n'ai pas bien vus, des gestes dont je n'ai pas saisi toute la portée, des faits dont je n'ai perçu qu'une toute petite partie. Je vais être heureux de lire et entendre vos impressions et vos ressentis, chers amis d'ADN et du MAN et de plein d'autres réseaux. Et maintenant que mes deux yeux conjuguent ensemble le verbe être et pas seulement l'acte d'avoir, je vais essayer de réunir ce que j'entendrai de vous en vous disant ce que je vois.

Planter un arbre ensemble, quel bonheur nous a été donné aux uns grâce aux autres.

 

Voici qu'un autrement devient possible
Voici qu'un autrement devient possible
Voici qu'un autrement devient possible
Voici qu'un autrement devient possible
Voici qu'un autrement devient possible
Voici qu'un autrement devient possible
Voici qu'un autrement devient possible
Voici qu'un autrement devient possible
Voici qu'un autrement devient possible
Voici qu'un autrement devient possible
Voici qu'un autrement devient possible
Voici qu'un autrement devient possible
Voici qu'un autrement devient possible
Voici qu'un autrement devient possible
Voici qu'un autrement devient possible
Voici qu'un autrement devient possible
Voici qu'un autrement devient possible
Voici qu'un autrement devient possible
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Voici qu'un autrement devient possible
Voici qu'un autrement devient possible
Voici qu'un autrement devient possible
Voici qu'un autrement devient possible
Voici qu'un autrement devient possible

Ça s'est passé dans un jour déterminé : le 9 janvier 2016, à une heure indiquée : 11 heures. Nous avons planté un arbre qui est d'une variété rare, dont l'histoire familiale est très ancienne à la surface de la planète Terre, et qui remonte dans la nuit des temps. Le Gingko Biloba est un arbre qui a résisté à une double catastrophe, celle qui a fait disparaître les dinosaures, et celle qui en faisant disparaître Hiroshima et Nagasaki a failli faire disparaître l'humanité. Un arbre planté en un endroit on ne peut plus signifiant de la terre, dans le vieux cimetière de Dampierre. Dans un coin du pays où nos ancêtres avaient coutume d'ensevelir ce qu'ils avaient ramassé qui restait d'eux. Cimetière entourant le lieu – dieu qu'est l'église à deux pas, pas trois, de la maison où nos parents nous ont conçus, mes sœurs, mon frère et moi, mis au monde et élevés, en quelque sorte, plantés nous aussi.

 

Endroit fixé avec Alain le garde-champêtre du village quelques jours auparavant, arbre planté dans un trou creusé par des membres de notre association : Alain , François, Gilbert, Pierre etc … Arbre cherché, trouvé et acheté dans une pépinière par François, planté avec plein de gens avec qui nous faisons équipe, association, réseau de solidarité depuis un long temps déjà … et aussi ceux à qui nous avons écrits, envoyé un message, ceux avec qui nous avons dit, de bouche à oreille : «  Veux-tu venir... tu es invité … nous plantons un Gingko Biloba… »

 

Plantation réalisée dans un but très précis : Demander à notre président de la république française qu'il procède dans l'immédiat à l'arrêt de l'armement nucléaire de la France de manière unilatérale, qu'il ne dise pas qu'il est d'accord mais veut attendre que les autres commencent et qu'après il ferait. Nous insistons que ça commence maintenant et non pas dans un temps indéterminé. Nous demandons cela afin d'arrêter de faire saigner notre humanité qui est en train de se vider de sa vitalité. Et que cet arrêt soit donneur de vie et non pas de leçon, que les forces que nous détenons se transforment, se transfusent et se transfèrent immédiatement aux femmes et aux hommes qui portent des enfants dans leur ventre et sur leur dos, en mourant de faim, de paix et de solidarité à l'instant même où nous plantons le Gingko Biloba. Avec, plantée dans le cœur de chacun de nous, la présence d'une petite fille, la petite fille Espérance dont parle Charles Péguy, celle là même d'arrêter le déferlement de la violence folle qui nous fait nous entre tuer. Cela est possible. Nous en sommes sûrs et certains.

 

Il me revient comme ça plusieurs événements fondamentaux. L'arrêt de la guerre d'Algérie par le cessez le feu du 19 mars 1962 et des accords d' Evian. Je les ai vécus. Nous sommes beaucoup à avoir vécu la guerre d'Algérie et l'arrêt de la guerre, le stop aux tueries, aux tortures, aux déportations de populations. Les gens qui ont été déracinés de chez eux peuvent revenir au pays pour s'y réinstaller. L’autrement devenait possible.

 

Il me revient, raconté par mon papa, sa joie de gamin né en 1910, quand à Belmont dans le Doubs, les cloches de la petite église ont sonné l'armistice le 11 novembre 1918. Son papa qui était à la guerre allait pouvoir revenir au pays ; la vie allait pouvoir devenir tout autre. L'autrement devenait possible. Notre grand père et notre grand mère allaient pouvoir s'unir à nouveau et donner une petite sœur à notre papa : Marie-Rose qui naîtra en 1920.

 

Il naît en moi cette petite fille Espérance que dans le « terrain vague » que les vivants et les morts du village nous avaient octroyés sans se concerter et dont nous avions fait notre « terrain de jeux précis » un arbre résiliant et résistant est planté.

 

Il naît en moi cette humble et petite espérance que, dans ce terrain, capturé sous nos yeux d'enfants par l'occupant allemand, puis par le libérateur américain pour y installer l'un et l'autre leurs munitions et leur dépôt de carburant, dans ce terrain un arbre résistant et résiliant est planté.

 

La toute petite Espérance germe en moi que, dans ce terrain que, nous enfants, nous avions récupéré pour y jouer à la guerre, se joue quelque chose de symbolique et d'effectif de la paix.

 

En 1945, après le 8 mai, tout le monde pensait que la guerre était finie. Hélas, dans ce terrain, nous enfants, nous nous mettions à jouer à la petite guerre, parce que nous avions vu et entendu jouer notre sort par les adultes dans les deux grandes guerres. Nous arrivions à tromper le vigilance de nos parents, ce qui nous captivait sur ce terrain, c'était d'y dégoter les munitions délaissées, « de la poudre et des balles » et tous les adultes n'y ont jamais rien vu. Avec mes copains, Yves, Denis et d'autres, nous jouions aux artificiers avec le risque de nous faire blesser ou tuer sur le seuil de la sacristie, là, à 50 mètres où enfin, un arbre résiliant va pousser.

 

Quel bonheur que ce terrain tellement déformé par les guerres, soit redevenu terrain de plantation, qu'il y pousse la paix, la résilience et la résistance à la violence.

 

C'est tout un symbole que de planter un arbre ! C'est l'inverse constructeur de diabol-ique, celui qui divise et démolit, déchiquette les corps, les maisons et les projets. Le symbole rassemble, réunit, réemboite ce qui était boiteux. Le symbole ouvre des horizons.

 

Il me revient quand on a annoncé que les états constituants l'Europe, créaient entre eux un espace, l'espace Schengen. Pour aller depuis le Jura de France, dans la Bavière de l'Allemagne rencontrer des amis, il n'était plus nécessaire de montrer sa carte d'identité nationale à un douanier. Nous prenions conscience que nous étions citoyens du monde. Il est important qu'au moment où arrivent des milliers de migrants obligés de fuir leurs pays pilonnés par nos bombes, nous tenions à cet espace Schengen. Particulièrement en ces temps, où les mêmes pays qui ont créé cet espace essayent d'édicter des lois et des décrets scélérats pour nous enfermer et empêcher l'arrivée des gens dans notre pays.  Alors qu'il n'y a pas très longtemps, nous-mêmes nous nous comportions occupants de ces pays.

 

Qu'est ce que je vais être heureux de recevoir et lire dans la conjugaison de mes deux yeux, ce qui a été dit et écrit ce jour-là de la plantation du Gingko Biloba : le texte de Pierre Jacquin, ce qu'a dit Grégoire Durant le maire de Dampierre, ce qu'a exprimé Antoinette Gillet, Michel Gerbaud, Caroline, la chanson du déserteur par Josette, ce que nous avons entendu de la bouche de Marie-Françoise et de Stéphanie à leur fils et petit-fils Noé. Et ce que nous nous sommes dit les uns aux autres et aussi dans le profond de nos consciences, en plantant ensemble le Gingko Biloba ce samedi 9 janvier 2016 à 11 heures à Dampierre, dans la terre du vieux cimetière.

 

Je suis confiant qu'en plantant le Gingko Biloba, en commun-commune, chacun de nous a senti et pris conscience, que s'implante en lui quelque chose comme des graines de la non violence. Il y a des comportements dont je vais me défaire et me démunir.

  • vis à vis des autres
  • vis à vis de moi-même
  • vis à vis de la Terre,
  • vis à vis de la politique et de l’Écologie,
  • vis à vis des graines, des semences, des arbres, des plantes, des ânes ...

pour adopter d'autres comportements et attitudes qui élèvent notre humanité.

 

Il y a des violences dont je suis en train de me démunir et de me défaire. Ce sont des graines de non violence et de respect qui viennent se loger à leur place.

Voici que l'autrement  possible se réalise.

Lulu

 

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9 décembre 2015 3 09 /12 /décembre /2015 14:23

Novembre 2015

 

Celui de sortir de la spirale du terrorisme.

Celui-là d'arrêter de nous entre-tuer d'une rive de la méditerranée à l'autre.

Celui-là d'arrêter de provoquer une multitude de gens à se sauver de l'enfer-mement causé en partie par le déluge de feu déversé sur eux de toutes parts.

Dans quel état d'urgence sommes-nous ?

Celui-là de nous défaire et démunir de nos violences, de celles qui nous sont faites, mais aussi de celles que nous faisons aux autres.

Christian de Chergé, prieur des moines de Tibhirine durant le déchirement du peuple algérien, vécu pendant les années noires, priait le Christ Jésus en lui disant : « Désarme-les, ceux qui nous font violence, mais désarme-moi d'abord, parce que moi aussi je suis violent »

 

Dans quel état d'urgence sommes-nous ?

En cherchant à prendre une part dans mon cœur et dans ma chair de ce qui est fait de violence à notre humanité en plein Paris, particulièrement depuis le 13 novembre, je refuse et je fais objection à certaines paroles et attitudes du président de notre république et de ceux qui veulent nous gouverner en entraînant notre pays dans la guerre. Certainement qu'il est très dur d'assumer de telles responsabilités politiques dans des circonstances comme celles que nous traversons actuellement. Mais justement, ne laissons pas nos élus isolés et seuls devant de tels choix et décisions.

Ce qui est urgent, ce n'est pas de partir en guerre, mais c'est de chercher comment désamorcer la guerre. Mercredi dernier je me trouvais dans une famille où les petits enfants de 12 et 8 ans arrivaient de l'école. La télévision donnait en boucle les informations. Je n'ai pas du tout adhéré et me suis opposé à l'élan altier et guerrier de notre président de la république déclarant devant les députés et sénateurs de la France, puis en présence de tous les maires de notre pays, et devant ces enfants de la patrie chez qui je me trouvais : «  La France est en guerre », puis entonnant la Marseillaise voulant nous faire chanter : » Aux armes, citoyens … le jour de gloire est arrivé »

ce n'est pas vrai que c'est un jour de gloire qui arrive. Alors ne le disons pas et ne forçons pas les gens à chanter : « qu'un sang impur, abreuve nos sillons » Il n'y a pas de sang impur. C'est raciste et guerrier que de le dire. N'appelons pas les citoyens aux armes, comme nous le faisons chanter aux enfants des écoles.

N'est-on pas en train de chercher à justifier les bombardements sur la Syrie et par là nos fabrications et nos trafics d'armes ?

Dans quel état d'urgence sommes-nous ?

Celui-là d'arrêter le terrorisme de Daesh en particulier, mais est-ce en entraînant les membres de l’Europe et nous-mêmes dans ces bombardements que nous y parviendrons ? Au contraire, je crains que nous soyons en train d'alimenter le terrorisme en continuant à prendre ce chemin-là.

Combien de gens innocents allons-nous continuer de tuer de manière aussi aveugle que celle dont les terroristes de Daesh ont tués les membres de notre jeunesse dans les attentats du 13 novembre. Ne sommes-nous pas en train de sombrer nous aussi dans un terrorisme ? 

Dans quel état d'urgence sommes-nous ?

C'est dans la diplomatie qu'il nous faut nous engager. Mais une diplomatie qui consiste dans la recherche d'un désarmement et non pas d'une intensité redoublée de largage de bombes sur une région exsangue où les habitants, enfants, femmes et hommes, devront continuer de se sauver de ce qui reste de leurs habitations, pour prendre le chemin risqué et obstrué de la migration. Ca me rappelle trop l'inanité de l'établissement du plan Challes en Algérie en 1959-1960, opérations aux- quelles hélas, j'ai participé.

Allons enfants de la patrie, arrêtons de faire couler le sang des autres et le nôtre, sur les sillons de notre terre. Au contraire, semons et faisons humblement pousser dans ces sillons, les actes, paroles et graines de la résistance à la violence, de la diplomatie, du respect et de la relation entre les humains quels qu'ils soient. En cela réside l'urgence à laquelle nous sommes tenus.

Comme l'a dit et écrit récemment Jean-Marie Muller : « Face à la violence du terrorisme, les citoyens ne sont pas mis en demeure de répondre à la violence de la guerre. Nous devons certes surmonter toute peur et nous mobiliser, mais pour résister à la logique de la terreur qui est la logique de la violence. L'arme des terroristes est d'abord une arme idéologique et c'est cette arme qu'il faut briser »

« Face à l'inhumanité du terrorisme, l'urgence est d'affirmer les valeurs universelles d'humanité qui fondent la civilisation. Ce sont les mots de notre devise républicaine qui doivent inspirer notre action : Liberté, Égalité, Fraternité »

Afin de réellement nous engager sur les chemins de la défense de notre humanité, « plutôt que de prendre les armes, prenons le livre » comme disaient et vivaient les moines de Tibhirine, ce livre où est écrit notre dignité d'hommes, aux uns et aux autres.

N'est-ce pas sur ce chemin de la résistance et de la résilience qu'il est urgent de nous engager ? !

 

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5 novembre 2015 4 05 /11 /novembre /2015 22:05

Dampierre, le 06 octobre 2015 (Jour anniversaire de ta naissance, chère Maman)

 

1ère partie de la lettre ici

 

Je suis allé appuyer mon dos contre le tronc du Ginkgo Biloba, ce merveilleux arbre qui se trouve dans la cour de la maison commune, à quelques pas de l'endroit où la chouette est revenue habiter dans le clocher de cette autre maison qui nous est commune : l'église.

 

Revenir où nous avons été conçus, mis au monde et entourés de tendresse #2

Depuis deux ans bientôt, chaque 1er lundi du mois, justement dans une salle de la mairie de Dampierre, nous nous retrouvons avec toute une équipe d'amis, dans le sillage du M.A.N.V. (Mouvement pour une Alternative Non Violente) nous vivons en ce jour un jeûne non pas privatif, mais partageur. Nous menons une action pour nous démunir, nous défaire, et nous désincarcérer de l'enfer-mement du nucléaire. Un de nos amis, Pierre, a proposé que le groupe s'appelle A.D.N. Nos partages sont axés sur nos façons d'Agir pour que nous français, nous Désarmions notre pays du Nucléaire de manière unilatérale. De temps en temps, en mettant mon dos contre l'écorce du tronc du Ginkgo Biloba, je frotte mes côtés et ma colonne vertébrale contre la rugosité de l’écorce de cet arbre. Je fais les mêmes gestes qu'accomplissait notre papa en s'appuyant tout contre le tronc de tel ou tel cerisier ou pommier qu'il avait plantés. Qu'est ce que pouvaient bien se raconter notre papa et ses arbres ? Beaucoup de choses de la sagesse " Ces choses cachées depuis le commencement du monde".

 

Je parlais l'autre jour avec le Ginkgo Biloba. Des enfants me voyant appuyer mon dos contre cet arbre me demandèrent ce qui arrivait. Je leur racontais que j'étais en train de crier ma révolte à l'arbre, contre mon propre comportement qui abime ma vie et celle des autres. Avec les enfants, je me laissais étonner par la capacité de résistance qui habite cet arbre, jusque dans le fait qu'il ne s'est pas laissé briser lorsque des hommes ont fracturé la matière, et par là ont cassé et notre histoire et notre humanité, quand ils ont  déclenché la déflagration d'Hiroshima et de Nagasaki. Adossé à l'arbre Ginkgo Biloba, je me souvenais alors, que tout homme et donc moi même est habité de résilience. En appuyant mon dos d'homme contre la colonne de l'arbre, je recevais comme une douce secousse. Quelque chose de la sève de résistance de l'arbre aux ouragans de violence, cherchait à se transfuser en mon être. En mettant mon corps tout contre l'arbre " je ne prenais pas un chemin de grandeur ni de prodiges qui me dépassent" (Ps 130) mais celui là de la non violence et de la tendresse comme l'ont si merveilleusement réalisés la petite Thérèse de Lisieux et le Povorello d'Assise. J'entendais que le Ginkgo Biloba voulait m'aider à changer mon regard sur les gens de mon village et sur ceux qui s'y arrêtent ou le traversent. A nous tous, l'arbre nous disait: " Enfants de Dampierre et d'ailleurs, je ne vais pas tarder un jour de grand vent, à vous donner à chacun une petite feuille d'or où le soleil aura écrit les noms de celles et ceux qui vous attendent. Lorsque vous ramasserez cette petite feuille d'or, vous recevrez en même temps quelque chose de cette sève qui m'a été donnée et qui continue de l'habiter, à condition que je ne la garde pas pour moi tout seul. Si je n'étais pas prêt en permanence à vous communiquer cette petite feuille, porteuse de la sève de résilience, il y a longtemps que je serai mort. Et je crois bien que ce sont les oiseaux migrateurs qui sont venus se loger en mes ramures, depuis mon plus jeune âge, comme l'ont expérimenté mes ancêtres depuis des millénaires, ce sont ces oiseaux migrateurs qui m'ont donné d'être habités de cette sève et de cette capacité de résistance à toute violence.

 

En ne mettant pas de barrière à la venue des oiseaux migrateurs, jusque chez moi ni non plus aux alentours, je prends conscience d'une plénitude de choses possibles. C'est inouï ce que le vent qui a poussé ces oiseaux jusque là me souffle de choses réelles auxquelles je n'avais pas pensé.

Depuis que je suis petit arbre, c'est cet apprentissage qui continue de me faire pousser et résister aux violences. J'ai besoin de vous, sœurs et frères humains, pour que soit maintenue ma résistance et que se réalise celle des autres en notre " maison commune " jusqu'à la finition du monde dans la durée des temps."

Je m'étais mis à sourire et les enfants aussi. L'arbre Ginkgo Biloba avait deviné. Il nous dit encore " Je vous parle comme Jésus dans l'évangile. C'est vrai que j'ai beaucoup puisé à cette source " Laudato Si " dit le pape François. Martin Luther King. Gandhi, Tolstoï et combien d'autres le disent aussi: La source de la non violence a jailli au flanc de la montagne de Galilée. C'est sur ces sentiers qu'il nous faut apprendre à vivre et à aimer, afin de tracer d'autres chemins là où nous vivons.

C'est alors que me revinrent les pensées, les paroles et les actes des moines de Tibhirine rencontrés au printemps de l'année dernière avec Bernard, Nelly et Claude.

Et quelle ne fut pas ma joie aussi, il y a quelques jours, de laisser s'entremêler nos pas, nos pensées et nos prières avec ceux de Jean-Pierre Schumacher et des moines du petit monastère de Midelt au Maroc en compagnie de Frère Benoit de l'abbaye d'Acey. J'ai été très touché de pouvoir ramasser en ces lieux, plein de petites graines de non violence, une multitude de feuilles d'or comme celles du Gingko Biloba.

Les hirondelles, la chouette, le Ginkgo Biloba de Dampierre, le pommier de Midelt nous disent en arbres et en oiseaux de bon augure, que c'est là où nous vivons, en nos jardins intérieurs et communaux, qu'il nous faut ramasser ces feuilles et ces grains, et faire pousser ces semences et instaurer la culture de la non violence. « Si tu veux la paix, fais la paix »

 Lulu

 

 

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4 novembre 2015 3 04 /11 /novembre /2015 20:28

Dampierre, le 06 octobre 2015 (Jour anniversaire de ta naissance, chère Maman)

 

Dans la maison où notre maman nous a mis au monde, quelques nids d’hirondelles demeurent, accrochés aux poutres de l’étable où ruminaient nos vaches et leurs petits veaux. Pendant de nombreuses années, durant mon enfance et ma jeunesse, j’ai entendu et contemplé, le printemps venant, le retour des petites hirondelles de l’année d’avant.

Ça remonterait, parait-il, à un coin de la nuit des temps, qu’à quelques unes, les petites hirondelles des nichées des années précédentes reviennent, là où leurs parents les ont couvées. Enfant, j’ai aimé entendre les parents hirondelles faire piailler de plaisir leurs petits, lorsqu’ils leurs rapportaient des gorgées d’insectes gobés au cours de leurs vols incessants autour du clocher de l’église.

C’est dessous ces envols d’oiseaux à tire d’aile que moi aussi, avec mes sœurs et mon frère, nos copains et nos copines, nous courions et jouions entre notre maison natale, l’église et l’école. C’est à travers les allées et venues de nos vies familiales et paysannes que la foi confiance en Jésus et en notre humanité nous est venue.

Hélas, depuis quelques années, lorsque vient le printemps, bien que nous ayons respecté les nids ancestraux de ces hirondelles et continué d’ouvrir les fenêtres et les portes de l’étable, il n’est pas revenu de petites descendantes de ces hirondelles. A la lecture de la fine petite revue de la Hulotte, dans les numéros spéciaux sur les oiseaux migrateurs, on apprend que la disparition des hirondelles dans certains coins de nos pays, n’est pas liée uniquement à quelques ouragans et colères atmosphériques, mais aussi à certains de nos comportements humains. Pour que se réalise le retour des hirondelles en nos printemps et dans leurs nids, sous les toits de nos maisons, il faudra encore beaucoup de temps. Qu’est ce qui provoque ces catastrophes et ces empêchements de migration ? Essayons de le découvrir.

 

 

A quelques semaines de la conférence de Paris, dans le sillage du Povorello d’Assise, avec qui les oiseaux causaient  parce qu’il savait les regarder, les écouter et respecter leurs emplacements, j’entends un appel. Dans la vérité claire de la parole du pape du même nom, François, à propos de notre planète et de notre humanité, j’entends un appel et une interpellation à changer mes façons de vivre et mes habitudes, afin d’être facilitateur des trajets de tous les êtres migrateurs. Je comprends que je dois chercher à me démunir «  du tout avoir individualiste » et tenter de chercher et trouver les chemins « du bien être commun » : la découverte que l’ « on ne peut être bien » que lorsque chacun trouve une place qui devienne sa place.

Justement, quelle place faisons-nous à l’autre en nos comportements ? Quelle place laissons-nous aux migrants en notre société ? «  N’est-ce pas l’hirondelle qui fait le printemps ? «  Nos ancêtres, nos parents ont appris à accueillir les réfugiés. « Ils se sont souvenus que notre ancêtre Abraham était un araméen errant » (Deut.26, 5) Et si c’étaient les migrants qui feraient advenir notre humanité ? C’est pour cela qu’il faut habiller d’humanisme nos habitudes (Habitat et Humanisme) disent Bernard Devert et ses compagnons. Ensemble, nous habituer à la venue de gens venant d'ailleurs.

L'autre soir, en raccompagnant Annie et sa maman à leur voiture, Annie me dit : " Écoute, tu entends le cri de la chouette ! Vous avez de la chance, gens de Dampierre ! Regarde ! Je viens de voir une chouette toute blanche voler dans la nuit noire ! "

Merci Annie de ce que tu me fais voir et entendre. Je suis heureux que dans le clocher de notre village la chouette soit de retour. N'est-elle pas le signe et le symbole de la sagesse ?

 

 

Le chant du monde de Lurçat

Le chant du monde de Lurçat

LURÇAT dans une de ses tapisseries, représente le danger très grave que fait courir à notre humanité l'armement nucléaire. Jean-Marie Muller a su nous décrypter le sens de cette œuvre d'art et nous en livrer un message prophétique. Voilà ce que j'en ai gardé pour toujours. L'humanité et le monde sont rassemblés sur un grand vaisseau, sorte d'arche de Noé. L'homme est à la barre. Un dragon, prêt à cracher le feu atomique surplombe notre embarcation. Heureusement, la chouette est logée sur la tête de l'homme.

Pendant un temps, la chouette avait disparu de notre clocher de Dampierre. Sans doute avait elle été obligée de fuir certains de nos comportements dévastateurs. Voici qu'elle est revenue nous habiter de sérénité et de paix jusque dans nos nuits et nos songes.

...

 

Suite demain

Retrouver ici une lettre de JM Muller en lien avec la tapisserie de Lurçat

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29 octobre 2015 4 29 /10 /octobre /2015 21:15

Au lendemain de notre arrivée au Monastère de MIDELT avec le frère Benoît de l’Abbaye d’ACEY, le 8 septembre 2015, une profonde joie habite en mon être. C’est celle de trouver ce mot « RESURGENCE » pour signifier la continuité de prière aimante et de travail humble qui existent entre les moines de TIBHIRINE et ceux de MIDELT. En Franche-Comté, nous avons appris à l’école que la Loue est une résurgence du Doubs ; c’est dans le sous-sol de la plaine karstique de Pontarlier, que l’on se rend compte qu’une partie de l’eau du Doubs se perd. Cette eau ressort à OUHANS. C’est la source de la Loue. De même, lors du drame de la disparition des sept moines de Tibhirine, on a pu penser que c’en était fini de la vie des moines, de ce qu’ils avaient initié, de ce ruisseau de la non-violence qui, grâce à leur engagement irriguait notre humanité. Au mieux, on garderait des traces de ce qui s’était vécu à Tibhirine, à travers les écrits de Christian De Chergé, et des autres moines :« Sept vies pour Dieu, Sept vies pour l’Algérie ». On essayerait de se laisser travailler par ce courant étonnant. Mais c’était sans compter sur « L’Invincible espérance », tellement vécue par les moines de Tibhirine. Cette humble espérance cherchait à sourdre ailleurs pour que nous puissions y étancher notre soif, sans cesser de continuer à couler à Tibhirine. C’est alors que les deux moines Amédée et Jean-Pierre, survivants de Tibhirine, sont venus rejoindre les membres du petit monastère marocain de FEZ qui se transféra par la suite à MIDELT. J’avais beaucoup lu les écrits de Christian de Chergé et des autres moines dans le livre de Christine REY. J’avais vu plusieurs fois le film « DES HOMMES ET DES DIEUX ». Et puis, j’étais allé à Tibhirine avec Nelly, Bernard et Claude, en Mars 2014.

 

Dans l’immédiat de notre arrivée à Midelt avec le frère Benoît de l’Abbaye d’ACEY, le mardi 8 Septembre, je sentis le trait d’union entre Tibhirine et Midelt. Il y a comme un courant souterrain qui se faufile dans le ventre de la terre, d’un lieu à l’autre, sous la chaine de l’ATLAS. Il y a comme un souffle persistant qui anime d’un endroit à l’autre, en traversant les frontières estimées impénétrables. D’où me venait cette impression, au point que je pus dire avec joie à la poignée des moines qui nous accueillaient : « en franc-comtois que je suis, je voudrais vous dire que Midelt est une résurgence de Tibhirine. » ? Fort probablement, ça nous venait du fait de l’habitation d’Amédée et de Jean-Pierre en ce lieu, eux qui ont vécu de nombreuses années à Tibhirine. Ça venait aussi du fait que le Maroc, comme l’Algérie est imprégné de la culture Berbéro-Arabe, et de la religion de l’Islam. Aussi, très vite, j’ai senti à Midelt que, si l’espace du monastère était clos et ramassé, c’était pour être offert et ouvert. Je me rappelai les mots de Jésus à la multiplication des pains : « ramassez les morceaux afin que rien ne se perde » ( Jean, Ch 5). Il me revenait aussi les mots de notre papa sous les pommiers à Dampierre : « on va ramasser les pommes… comme ça elles ne seront pas perdues. On va ramasser sans amasser, on va ramasser pour donner ». Ce que je voyais vivre à Midelt, c’est bien ce que j’avais senti qui s’était vécu à Tibhirine.

Et de fait, je ne tardai pas à me rendre compte que, discrètement, mais efficacement, des liens se sont tissés et continuent de se créer à Midelt entre les membres de la population de la ville et des environs et la petite poignée des moines, comme à Tibhirine. Il ne faut pas oublier non plus qu’aujourd’hui à Tibhirine, entre Jean-Marie LASSAUSSE et les gens qui travaillent à la ferme, ainsi qu’avec les personnes qui assurent la permanence, beaucoup de monde qui passe peut se ressourcer au souffle des « sept vies pour Dieu et sept vies pour l’Algérie ».

 

Dès notre arrivée le mardi au soir à Midelt, après le repas à l’hôtellerie, je fus marqué durant les complies par le chant des psaumes et du « Salve Regina » … Nous vivions la reconnaissance de ta présence, Ami Jésus, et celle de ta Mère, au cœur de nos vies, comme c’était chanté à Tibhirine, comme c’était traduit dans le film « des hommes et des dieux ».

J’étais aidé dans tout ça par le fait que je voyais le visage du frère Jean-Pierre Schumacher. En vivant ce moment intensément, je me disais, et c’était ma prière : « Ami Jésus, merci de me permettre de rencontrer le frère Jean-Pierre, il est là sous mes yeux, à quelques mètres de moi. Il est le frère qui a vécu avec Amédée, Christian de Chergé, et les autres moines : Christophe, Michel, Célestin, Luc, Bruno et Paul, il y a une vingtaine d’années … J’espère bien qu’il me racontera dans les jours qui viennent ce qu’il a vécu de ton amour dans la non-violence, en compagnie de ces sept hommes sur la tombe de qui je suis allé ramasser ce qui reste de mon être, moi, qui ai malheureusement fait la guerre d’Algérie. Il me racontera ce qu’avec ses frères, ils ont vécu d’amour et de mort, de relations et d’affrontements avec les gens de la région. Tu es notre Espérance, Vierge Marie, et notre Avocate : « Salve Regina …. Spes nostra salve … Advocata nostra … » Avant de m’endormir dans l’Hôtellerie, j’ai voulu relire le testament de Christian de Chergé : « Quand un A-DIEU s’envisage »

 

Ça ressemblait étonnamment à ton testament, Ami Jésus, que j’allai chercher au chapitre 17 de l’évangile de Jean : « Père, l’heure est venue… ». Toi, Christian de Chergé, et toi, Christ Jésus, qu’est-ce que vous vous ressemblez ! Faites que nous, Chrétiens, nous vous ressemblions.

Lulu le 8 septembre 2015

 

Testament de Christian de Chergé extrait de l'album "slams mystiques"

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19 septembre 2015 6 19 /09 /septembre /2015 19:46

Bonjour proches de notre ami et frère Lulu,


Ici tout va bien. Ce séjour est vraiment béni.
Rencontres, temps, enfin tout concoure à la joie.
VOICI un message de sa part.

Frère Benoît

 

Chers amis,

 

Dans le petit mot que je vous adressais il y a une semaine, je disais qu'en regardant vivre tout ce que je vois ici à MIDELT dans la communauté des moines avec Jean-Pierre, c'est le courant de TIBHIRINE qui fait "résurgence" que je découvre. Une chance inouïe m'est donnée comme à plein d'autres gens, c'est de pouvoir creuser avec l'un ou l'autre des moines dans des moments de "récréation" sur invitation journalière par exemple par OMAR et BAHA. Il y a bien sûr la liturgie des heures et de la messe, celle en l'honneur de St Cyprien, patron de l'Afrique du Nord, le 16/09. Dans tous ces moments, il se crée entre nous tous comme un "Ribhat es-salam" un lien de la paix.

 

Nous avons l'impression de nous trouver comme dans un jardin où nous apprenons les uns des autres comment cultiver les graines de la non-violence et de la vie fraternelle qui ensemençaient le jardin de TIBHIRINE. Je lis aussi beaucoup de textes des moines de l'ATLAS. Je relis souvent le testament de Christian de Chergé. Ça ressemble merveilleusement à la prière sacerdotale de JÉSUS au chapitre 17 de St JEAN. Et puis il y a tout ce qui a été écrit à leur propos. J'avais emporté dans mon sac à dos le livre de Jean-Marie MULLER sur les moines de TIBHIRINE avec la dédicace à Gaby Maire. C'est imprimé à la page 5 "en mémoire de Gabriel MAIRE, prêtre français, assassiné le 23 décembre 1989 à VITORIA BRÉSIL. Durant un des moments de récréation, j'ai apporté ce livre. Jean-Pierre, le prieur, m'a dit "ce livre est parmi ce qui a été écrit de meilleur à propos des moines. "

 

Pour toutes ces raisons, vous comprenez combien je me sens bien ici. J'écris tout ce que je peux de ce que j'entends et je vois de ces semences de non-violence. J'ai un peu l'impression quand je fais mon cahier pour ramasser tout cela, comme nous l'avons appris en JOC, d'écrire la suite des "actes des apôtres". Je devine que je vous fais rigoler en lisant tout çà ! Tant mieux. Je vous en raconterai d'autres avant de quitter MIDELT ce mardi 22… particulièrement notre grimpée à TATIOUINE ...

INCH ALLAH

 

Lulu

 

Semences de non-violence à Midelt
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14 septembre 2015 1 14 /09 /septembre /2015 11:40
Photo empruntée sur internet : http://chicha.over-blog.net/article-notre-dame-de-l-atlas-midelt-maroc-111064481.html

Photo empruntée sur internet : http://chicha.over-blog.net/article-notre-dame-de-l-atlas-midelt-maroc-111064481.html

A vous tous chers membres de ma famille et amis.

 

Un grand bonheur m'est donné durant tous ces jours vécus à Midelt. Je considère que ce monastère de N.D de l'ATLAS où je suis accueilli depuis quelques jours est "lieu source " comme une "résurgence de Tibhirine" a cause de la présence de cette poignée de moines, unis autour du frère Jean-Pierre, priant et travaillant, en communion avec des religieuses franciscaines, en osmose avec les habitants, musulmans pour la plupart, je me sens appelé à prier avec eux, à les écouter. Je laisse travailler et irriguer dans ma peau d'homme ce qui coule de cette source d'amour qu'est Jésus vivant ici, à travers leur médiation. je ramasse tout ce" que je peux de graine de non violence au contact de ces frères et sœurs en humanité de Midelt. J'aurai à cœur en rentrant auprès de vous , de vous les offrir pour que nous continuons ensemble la culture de la non violence en nos jardins intérieurs et communaux, seul chemin comme le dit Jean-Marie Muller pour que soit sauvé et libéré notre humanité.

Je vous remercie de m'avoir envoyé balader ici.

 

LULU

 

 

Il est vrai que notre ami et frère LULU semble fin heureux ici.

Il est en très bonne forme.

Il faut dire que les gens sont chaleureux, le temps magnifique, le cadre splendide et la soupe très bonne.

Frère Benoît

 

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4 septembre 2015 5 04 /09 /septembre /2015 21:25

Dampierre le 03 septembre 2015

 

Chers amis,

 

Après le cercle du silence de samedi 5 septembre, à Dole, et le jeûne pour demander l’arrêt de l’armement nucléaire de la France, lundi 7 septembre à Dampierre, je pars pour MIDELT au Maroc, avec le Frère Benoit de l’Abbaye d’Acey. Nous allons retrouver le Frère Jean Pierre SCHUMACHER, survivant de Tibhirine.

 

Je pars auprès de cet homme et sa petite communauté, vivre quelques jours avec eux, afin de travailler, à me défaire de mes violences, et de contribuer ainsi, à ce que mon pays, la France, se désarme, arrête de fabriquer, de vendre, des armes.Je vous dis à tous, en vous emportant dans mon cœur, mon amitié reconnaissante. J’écris cette lettre en union avec vous, à Jean Marie MULLER, à son épouse Hélène, à leurs enfants et petits enfants.

A la revoyotte.

Je pars du 8 au 22 septembre.

Toute ma fraternelle reconnaissance.

Lulu

A la rencontre de frère Jean-Pierre au Maroc

Abbaye d’Acey, le 2 septembre 2015

 

Chers Hélène et Jean Marie,

 

Durant ce mois d’aout qui vient de se terminer, j’ai beaucoup et souvent pensé à vous :

 

Les 3, 6 et 9 août, jours anniversaires des drames de Hiroshima, Nagasaki, où avec les amis du groupe ADN-MAN, nous avons à Dampierre, jeûné, afin d’être d’avantage parties prenantes pour la recherche efficace et l’exigence d’un monde et d’une humanité sans arme nucléaire, à commencer par notre peuple de France. Merci pour ce que vous pensez et écrivez, et rendez possible, que ça se lise et nous entre dans la peau et la conscience, ainsi que dans nos attitudes de chaque jour.

 

Pour tout cela, recevez toute mon amitié reconnaissante. C’est pourquoi aussi ma pensée et mon affection fraternelles vous rejoignaient les 8 et 18 août, jours de vos fêtes, chers Jean Marie et Hélène. Belle et bonne fête, et bonne santé, ainsi qu’à chez vos enfants et petits enfants.

 

C’est aussi grâce à vous que l’an dernier, avec trois amis, j’avais pu aller à Tibhirine, par la médiation d’Anne et Hubert PLOQUIN, vos cousins. Cela m’aide encore aujourd’hui, à partir le 8 septembre en direction de Midelt, au Maroc, avec Benoit, un frère de l’Abbaye d’Acey, rencontrer le Frère jean Pierre Schumacher, survivant de Tibhirine.

 

De cet homme et de sa petite communauté, je vais continuer de beaucoup apprendre à me désarmer de mes violences, et de celles qui abiment mon pays par la fabrication, la dotation et le trafic des armes nucléaires notamment.

 

Me souvenant d’une de tes paroles Jean-Marie lors de ta venue, à Dole, Poligny, et Besançon en avril 2015 : « Christian de Chergé, c’est de l’or pur. » Je me laisse marquer par la fin du livre que Christine Ray écrit sur lui. Christian dit depuis Tibhirine : «  Chrétiens et Musulmans, nous avons un besoin urgent d’entrer dans la miséricorde mutuelle. » Une parole commune qui nous vient de Dieu, nous y invite.

 

C’est bien la richesse de sa miséricorde qui se manifeste lorsque nous entrons modestement dans le besoin de ce que la foi de l’autre nous en dit Et mieux encore, de ce qu’il en vit. Cet exode vers l’autre ne saurait nous détourner de la Terre Promise, s’il est bien vrai que nos chemins convergent quand une même soif, nous attire au même puits.  Pouvons-nous nous abreuver mutuellement ?

 

"C’est au goût de l’eau qu’on en juge. La véritable eau vive est celle que nul ne peut faire jaillir ni contenir. Le monde serait moins désert si nous pouvions nous reconnaitre une vocation commune, celle de multiplier au passage, les fontaines de miséricorde." « L’invincible espérance, p.73 »

 

Je vous embrasse de tout mon cœur d’ami reconnaissant et vous emporte avec moi.

Lulu.

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30 mai 2015 6 30 /05 /mai /2015 20:43
Photo empruntée ici : http://huff.to/1Hwg4w4

Photo empruntée ici : http://huff.to/1Hwg4w4

Dampierre le 27 mai 2015

 

Monsieur François Hollande, Président de la République française,

 

 

Lorsque j’ai appris, il y a quelques mois, que vous preniez l’initiative de faire entrer au Panthéon, Geneviève De Gaulle- Anthonioz, Germaine Tillion, Pierre Brossolette, et Jean Zay, je vous ai remercié au profond de mon être. Je viens vous l’exprimer par cette lettre.

 

Votre décision, m’a fortement interpelé, à intensifier la lecture des ouvrages écrits par ces personnes, ou par d’autres à leurs sujets. Cela m’aide ainsi, à faire entrer davantage en moi, l’esprit et le souffle de résistance, qui habitent ces quatre personnes.

 

Il est 13 heures 30 en ce jour ou je commence à vous écrire. Humblement et dans la fraternité qui nous relie, au sein de la République dont vous êtes le Président, je voudrais vous souffler une idée, pour le discours que vous allez prononcer tout à l’heure :

« Et si vous deveniez, dans le sillage de ces quatre personnes que vous faites entrer au Panthéon, un chef d’Etat qui déclare la paix ! »

 

Vous l’avez reconnu, j’ai repris cette idée chez Théodore MONOD.

 

Je vous ai déjà écrit à plusieurs reprises des lettres, dans ce sens là, lorsque je m’étais mis en marche pour la paix, en 2012 - 2013 avec mon âne Isidore en direction de Bethléem, afin de puiser là-bas, à la source de la paix. Mais j’apprenais, en entrant à Bethléem, qu’il y a entre Israël et la France, un trafic et un marchandage des armes que nous fabriquons, et notamment des armes nucléaires.

Nous courons et faisons courir le risque de faire éclater notre berceau qu’est la Terre, et de faire sombrer notre Humanité dans l’abime. Notre responsabilité est très grande.

 

Avec mes amis du M.A.N. et d’ A.D.N. (Mouvement alternatif de la non violence) et (Action pour le désarmement nucléaire unilatéral de la France) nous pensons et disons que faire entrer des résistants au Panthéon, comme nous le faisons aujourd’hui, ça nous engage à faire entrer en nous, en nos attitudes et comportements, personnels et collectifs, engagements et comportements étatiques, leur esprit de résistance à la violence et particulièrement à la violence qu’ est la guerre, à la guerre nucléaire notamment, qui pourrit nos relations avec les autres états, dotés ou non de l’arme nucléaire. C’est pourquoi nous demandons que la France arrête l’armement nucléaire de manière unilatérale.

 

Je vous écris dans la fraternité, l’estime et le respect que j’ai pour votre personne et pour la responsabilité qu’est la vôtre, celle de Président de notre République.

Je termine ma lettre, après avoir vu le reportage télévisé, de l’entrée des quatre résistants dans le Panthéon. J’ai profondément écouté votre discours. Je l’apprécie beaucoup.

 

Et si vous y ajoutiez, ce qui nous vient de Théodore MONOD et qui est attendu par tant de monde :

« Aujourd’hui, moi, Président de la République française, en faisant entrer des résistants au Panthéon, je déclare la paix en résistant et renonçant à l’armement nucléaire de la France de manière unilatérale. »

 

En ce jour je trouve ces mots dans le livre de Germaine TILLION,

« Les ennemis complémentaires », livre écrit en 1960 :

« Partout où nos troupes gagnent, la France perd. »

 

Ne pensez vous pas, qu’en supprimant notre arsenal nucléaire, nous contribuerions à barrer la route, aux comportements terroristes de Daesch, de Boko Haram et autres. Nous participerions à l’arrêt de la misère, de la faim, de la pauvreté dans le sillage du mouvement ATD Quart Monde et nous serions créateurs d’emplois, et enfin, nous serions fidèles à notre engagement au TNP (traité de non prolifération des armes nucléaires.)

 

La France en entrant dans la résistance, et dans le renoncement à l’arme nucléaire de manière unilatérale « libèrerait l’humanité de la prison des armes nucléaires. »

 

Croyez Monsieur Le Président de la République, à mes sentiments de respect, d’amitié reconnaissante.

 

Lucien CONVERSET

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Présentation

  • : Lulu en camp volant
  • Lulu en camp volant
  • : Lucien Converset, dit Lulu est prêtre. A 75 ans, il est parti le 25 mars 2012 avec son âne Isidore en direction de Bethléem, où il est arrivé le 17 juin 2013. Il a marché pour la paix et le désarmement nucléaire unilatéral de la France. De retour en France, il poursuit ce combat. Merci à lui ! Pour vous abonner à ce blog, RDV plus bas dans cette colonne. Pour contacter l'administrateur du blog, cliquez sur contact ci-dessous.
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tous les 1ers lundis du mois de 14h à 17h en hiver, de 16h à 18h en été, à Dampierre (39) avec un temps de partage et de réflexion animé par Lulu.

Et commémoration des bombardements d'Hiroshima et Nagasaki entre les 6 et 9 août, chaque année.

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